au moment où les yeux sont tournés vers l'ouest du continent frappé par une redoutable épidémie du virus d'Ebola. Tisser des liens économiques plus solides entre les États-Unis et l'Afrique, région prometteuse à la croissance supérieure à celle du reste du monde (le FMI table sur 5,8 % en 2015) : tel est l'objectif central de ce sommet de trois jours dans la capitale fédérale.
Washington, qui promet que la sécurité, la gouvernance et les droits de l'homme seront aussi à l'ordre du jour, revendique sa place comme partenaire d'une région que M. Obama qualifiait il y a un an de "prochaine grande success-story mondiale". Les États-Unis ne pointent désormais qu'à la troisième place au tableau des échanges commerciaux avec l'Afrique, loin derrière l'Union européenne, solidement en tête, et la Chine.
La Maison-Blanche assure que son initiative n'est en rien une riposte - tardive - à la "Chinafrique". Tout, pourtant, dans les propos américains démontre que la fulgurante offensive de la Chine sur le continent au cours de la décennie écoulée est dans tous les esprits. "Mon conseil aux dirigeants africains est de s'assurer que si la Chine construit des routes et des ponts, d'une part ils embauchent des travailleurs africains, d'autre part que les routes ne relient pas seulement les mines au port qui permettra de rallier Shanghai mais que les gouvernements africains aient leur mot à dire dans la façon dont ces infrastructures seront bénéfiques sur le long terme", soulignait M. Obama dans The Economist.
Une loi anti-homosexualité annulée
La prolongation de l'Agoa, le programme américain accordant des avantages commerciaux à certains produits africains ou encore l'initiative "Power Africa" qui vise à doubler l'accès à l'électricité en Afrique subsaharienne seront au menu des discussions. La composition de la liste des invités a fait - un peu - grincer des dents. Seuls les dirigeants de quatre pays, jugés infréquentables, n'ont pas été conviés : la Centrafrique, l'Érythrée, le Soudan et le Zimbabwe. Les indéboulonnables présidents de la Guinée équatoriale (Teodoro Obiang Nguema), du Cameroun (Paul Biya) ou encore de l'Angola (Eduardo dos Santos) ont en revanche reçu un carton d'invitation.
Pour l'organisation Human Rights Watch, M. Obama ne peut pas rester silencieux sur les droits de l'homme et doit en particulier insister sur le cas de la Guinée équatoriale, où "la pratique de la torture est monnaie courante". Le chef de l'État ougandais, Yoweri Museveni, a, lui, soigné sa venue. La Cour constitutionnelle ougandaise a opportunément annulé vendredi une loi anti-homosexualité qui avait suscité un tollé international et déclenché des sanctions américaines.
Stratégie régionale contre Boko Haram
Sur le dossier sécurité, la menace d'al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), les attaques répétées de Boko Haram, la guerre civile au Soudan du Sud ou encore les offensives meurtrières des shebabs somaliens au Kenya seront immanquablement abordées. Pour le président américain, l'un des sujets centraux du sommet sera de "trouver les moyens de renforcer les capacités africaines dans les efforts de maintien de la paix et de résolution des conflits". Avant son départ pour Washington, le président camerounais Paul Biya a souligné que cette rencontre devait être l'occasion de mettre en place, avec le Nigeria, le Niger et le Tchad, une véritable "stratégie régionale" pour lutter contre Boko Haram. "Parce que c'est un mouvement terroriste international, il faut aussi le prendre à l'international", a-t-il affirmé. Mais c'est une crise sanitaire, celle du virus Ebola, à l'origine de plus de 700 morts en Afrique de l'Ouest, qui pourrait occuper le devant de la scène.
Accaparés par la gestion de ce qui est, de loin, la plus grande épidémie en près de quarante ans d'histoire de cette maladie, le président sierra-léonais Ernest Bai Koroma et son homologue libérienne Ellen Johnson Sirleaf ont renoncé à venir aux États-Unis. Des contrôles médicaux seront mis en place à l'arrivée sur le sol américain pour les délégués venant de pays affectés, des mesures de précaution pour des personnes qui auraient couru un "risque marginal, infinitésimal d'exposition", a assuré M. Obama, qui s'est voulu rassurant.
Si M. Obama n'a prévu aucune rencontre bilatérale, la Maison-Blanche mettant en avant un casse-tête logistique et diplomatique, un grand dîner à la Maison-Blanche aura lieu mardi soir. Le nouveau président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, qui a décliné l'invitation à se rendre à Washington, fera partie des absents remarqués. Pour Peter Pham, de l'Atlantic Council, en organisant ce sommet inédit, M. Obama, né d'une mère américaine et d'un père africain, cherche d'abord à "changer la perception" d'un continent qui compte six des dix pays dans le monde connaissant la croissance la plus forte mais reste encore, aux États-Unis, étroitement associé "aux conflits, aux maladies, à la pauvreté". AFP