A les entendre, cette initiative n'a rien à voir avec la révolution burkinabé ayant conduit à la pantalonnade de Blaise Compaoré. Mais, on n'est pas obligé de naître de la cuisse de Jupiter pour se rendre compte qu'il n'en est rien. Le sprint de l'ex-chef d'Etat burkinabè de la présidence du Faso a bel et bien inspiré leur mouvement. Peut-être espèrent-ils faire courir aussi vite Faure. Ezossima, campé dans ses chaussures, sans même leur répondre, les regarde avec l'air de leur dire "vous vous fourrez le doigt dans l’œil".
A quelques jours des élections, une telle manœuvre est toute aussi risquée que maladroite, d'autant que la situation burkinabè n'a rien à voir avec le cas togolais. Ici, l'opposant historique Gilchrist Olympio n'a plus rien de christique et est allé s'offrir du bon temps dans le camp d'en face, et Jean-Pierre Fabre, si remuant soit-il, n’a pas le même charisme pour drainer l’ensemble de l’opposition. Plus grave: les reformes qu'exigent aujourd'hui les opposants ont été reléguées au titre d’accessoires à l’occasion d’un vote à l’Assemblée Nationale où la majorité présidentielle-pantin ne refuse rien à son chef, y compris l’imposer comme monarque à vie, dans une constitution où l’alternance reste impossible.
Il est vrai, aussi évident qu’on ne vend pas ses yeux pour regarder avec sa nuque, qu’une telle constitution, si cadenassée est insupportable pour tout démocrate et qu’aucun peuple, si benêt soit-il, ne peut continuellement l’admettre. Mais est-ce le moment pour faire céder Faure là-dessus ? A quelques semaines de la remise en jeu du fauteuil que le peuple lui a confié, Essozimna Gnassingbé osera-t-il risquer son suicide en faisant refondre une loi fondamentale qui lui est si favorable? Les opposants togolais qui n’ont jamais réussi à renverser le régime RPT (aujourd’hui UNIR), depuis les premiers soulèvements de 1990, vont, à coup sûr, subir encore un énième échec. Chez eux, l’éternel recommencement devient…une accablante habitude.