Les régenteurs de l’état potiche du Togo font la fête.Ils ont engrangé une victoire. Grâce à l’exploit de se faire élire, sans concurrence véritable,“au plus haut niveau du gouvernement mondial”. Parlez-en à un Togolais ordinaire et il vous demandera ce que cela va apporter comme léger mieux au train train qui l’épuise chaque jour ? Franchement, aucun. Dans ce cas, pourquoi alors un siège à l’ONU est-il devenu une victoire ? Il va falloir, après la fanfaronnade, que les heureux gagnants expliquent pourquoi nous devons fièrement jubiler. On devine que pour eux, c’est une sorte de légitimation. Tellement ils sont plongés dans les tréfonds de l’impopularité, qu’une place dans l’arrière train du Conseil de Sécurité des Nations Unies vaut le coût.
Maintenant que nous y sommes, “what next” ? Visiblement rien. Sinon, retour au piétinement sourd de notre démocratie. Une démocratie comme on n’en trouve nulle part ailleurs. L’ancienne ambassadrice des USA au Togo, Mme Patricia Hawkins, n’a t-elle pas suggéré aux africains de de s’inspirer de notre exemple ? En effet, au Togo, la démocratie marche, la légalité républicaine avance. A grand pas. Ou, devons-nous plutôt dire à grand-peine, si l’on sait que parfois il faut la CEDEAO pour nous dicter certaines de ses règles pourtant universelles. Non, elle marche très fort.
N’est-ce pas pour cette raison que tous les jeudis, les forces de l’ordre vont envahir le domicile privé de l’opposant Jean-Pierre Fabre, l’empêchant systématiquement d’aller et de venir ? C’est en son nom aussi que le pays n’est toujours pas doté d’un texte qui exprime clairement la nature du régime qui le gouverne, ni ne statue sur la durée du mandat présidentiel.
Notre système démocratique a atteint sa vitesse de croisière ; en connaissance de cause, les tortionnaires du pouvoir peuvent sévir sans que des actions en justice leur soient intentées.Parce que notre démocratie est des plus parfaites, le Major N’ma-Bilizim Kouloum, le carnassier d’Atakpamé qui a fait décapiter en 2005 plusieurs personnes en pays Ifè, s’est permis, au lieu du mea culpa, de demander réparation pour diffamation, en menaçant la CVJR et les victimes qui ont témoigné contre lui ?
Vive la démocratie des muscles.D’un trait monocolore, elle est d’un genre qui se distingue surtout par les visages alignés en premières loges à New York sur les bancs du Togo lors du vote de l’Assemblée Générale. C’est entre cousins que ce dossier qui tenait tant à coeur à Faure a été piloté. Ils rendaient compte directement au Boss.Au grand dam de certains cadres du ministère des affaires étrangères. Des langues se délient : “tout au long du processus, notre ministre de tutelle, Elliot Ohin, s’est contenté d’en recevoir par moments quelques bribes, à la dérobée”. Le représentant de Gilchrist au gouvernement a même failli ne pas être présent à New York.
“Le président le trouve tantôt envahissant, tantôt superflu et lui préfère Kofi Esaw, conseiller à la présidence en charge des questions diplomatiques, le vrai chef de la diplomatie togolaise”. Ce dernier, à cette occasion, s’est vu adjoindre un autre cousin, Calixte Batossie Madjoulba, ambassadeur du Togo en France. Quant à notre ministre d’état, Elliot, il s’en est tiré de justesse et ne sera autorisé à faire le déplacement de New York qu’à la veille du vote, en accessoire.
Il n’y a pas eu liesse à Lomé. Naturellement. Non seulement parce qu’il n’y avait pas eu de concurrent en face du Togo, mais surtout parce que le sujet, peu passionnant, ne fait pas partie des préoccupations des Togolais.
L’indifférence et le silence railleurs constatés sur place décrivent ce non événement mieux que les cris de joie des célébrateurs. Il s’agissait en réalité, à New York, d’une victoire sans mérite. S’il y a triomphe, il ne peut qu’être sans gloire.
Kodjo Epou
Washington DC
USA
Direction Generale & Broadcasting
