Commissaire européen au développement et à l’action humanitaire, et de sa déclaration à la presse pour lancer un appel pressant au peuple togolais, au Chef de l’Etat et aux partis politiques.
Mr Louis Michel a raison d’exhorter les togolais à prendre leur destin en main. C’est la seule solution de salut pour notre peuple. Depuis des années, je n’ai cessé de prêcher cette certitude. Je l’ai fait dans des conférences de presse, en campagne électorale, par des lettres adressées à Mr Manuel Barroso, Président de la Commission Européenne, à l’ancien Président Jacques Chirac, à l’actuel Président Français, à Mr Louis Michel et pendant des colloques, des forums, des réunions à travers le monde. Je me réjouis qu’enfin Mr Louis Michel se range sur notre conviction. C’est un secret de polichinelle que l’Afrique est dotée de ressources naturelles plus variées et plus abondantes que tous les autres continents. Elle est naturellement plus riche que l’Europe et les Etats-Unis. Par conséquent, c’est un fait immoral et une imposture de faire croire que les moins riches aident le plus riche. Non seulement notre dignité est bafouée mais en plus nous sommes crétinisés. Il a fallu du temps
et la faillite retentissante du système financier et bancaire international pour amener Mr Louis Michel à dire la cruelle vérité aux africains par l’intermédiaire des togolais.
En effet, l’Europe est en faillite, tout comme les Etats-Unis. La crise, qui les frappe, s’annonce longue et ses répercussions seront lourdes. Après la chute du mur de Berlin, les prédateurs de la finance internationale ont eu le champ libre pour accélérer leurs opérations de rapine. Avec leurs complices au sein des appareils des Etats, ils ont imposé, avec une suffisance sans pareille, leurs règles d’airain, qui sont la toute puissance de l’économie de marché, le refus de toute régulation par les Etats, le bradage des sociétés publiques appelé privatisation, l’adulation de l’argent et la diabolisation des Etats. Ils en ont profité pour dicter l’ascendant idéologique des néolibéraux et ont exercé une hégémonie sans faille, totale, absolue et brutale. Ils se sont abrités derrière les concepts de la démocratie et de la bonne gouvernance. Ils ont fait prévaloir l’épaisseur de leur curriculum vitae, leurs carnets d’adresses, leurs réseaux d’influence, etc. Leur terrorisme intellectuel
était sans équivalent. Ils ont ainsi dépouillé les peuples et les Etats de leurs richesses et de leurs pouvoirs. Ils les ont ruinés et les ont endettés pour plusieurs générations. Les peuples américains et européens ont été aussi crédules que le peuple africain. Quand il était arrivé que par instinct les peuples français et hollandais s’étaient opposés au traité constitutionnel européen, ils ont contourné et violé leur volonté pour faire passer le traité par les parlements nationaux. Aucune chance pour ces peuples car les élus de gauche sont aussi corrompus que ceux de droite et étaient passés depuis longtemps dans le camp des arnaqueurs.
Maintenant, nous sommes au bord du gouffre. Les pyromanes essayent de jouer aux pompiers. Ils ont choisi de renflouer les caisses des banques qui ont été pillées, d’en nationaliser certaines et font semblant de punir les escrocs en cols blancs. Mais il n’y a pas d’illusion à avoir, c’est une mafia. Ils sont redevables les uns des autres et sont des complices. Le reste est un jeu de théâtre tragique pour les masses populaires et les classes moyennes travailleuses. C’est pourquoi, les africains doivent se réveiller. Le temps est propice pour prendre notre destin en main et remettre en cause l’arrogance et la domination des occidentaux.
Pour ce qui concerne le Togo, je dois vous avouer que l’un des désaccords fondamentaux entre le défunt Président Eyadema et moi portait sur cette question de l’aide étrangère. Il avait gaspillé d’importantes ressources nationales et personnelles pour poursuivre cette chimère jusqu’à sa mort. Aujourd’hui, c’est encore une divergence primordiale entre Mr Faure Gnassingbé et moi. On lui fait croire comme à son défunt père qu’il pourra bénéficier de l’aide étrangère pour sortir le pays du chaos. C’est un mirage. Son nouveau Premier ministre a un lourd curriculum vitae et bénéficie du soutien des coteries extérieures. Mais ce ne sont pas avec ces acquis que l’on reconstruit un pays en ruine. Ce sont d’autres qualités et la confiance entière dans les potentialités de son pays et de son peuple qui font les grands hommes d’Etat et les reconstructeurs de nation. C’est ce que Mr Louis Michel a dit habilement à nos dirigeants. Il est vain de compter sur des prétendus bailleurs de fonds pour le
redressement national de notre pays. La promesse de l’aide budgétaire exceptionnelle de 15 millions d’euros, soit 9,8 milliards de FCFA, par l’Union Européenne montre bien que nous sommes loin des 600 milliards de FCFA annoncés après le retour de Bruxelles. Ces 15 millions d’euros serviront juste pour payer les gratte-papiers étrangers, qui viendront aider le gouvernement pour la réforme hypothétique de la justice. Globalement, l’aide de l’Union Européenne pour les 5 ans à venir est de 123 millions d’euros, soit 80,67 milliards de FCFA. Une bonne partie de cette somme servira au remboursement de certaines dettes, au financement des interventions des agences de l’ONU au Togo et à certaines missions de prétendus experts, etc. Une partie sera détournée et une misère restera pour les togolais. Voilà la triste réalité et c’est une gageure de compter sur des aides extérieures.
Les Etats-Unis, l’Europe et les grands contributeurs des institutions financières internationales étant en faillite, il y a un assèchement des liquidités dans ces institutions. Plus personne ne fait confiance à la Banque Mondiale, au FMI, etc., pour réguler ou financer quoi que ce soit d’intéressant. D’ailleurs, la faillite de ces institutions est avérée, l’incompétence et la corruption en leur sein certifiées. Les programmes criminels, que des bureaucrates insensibles à la souffrance des peuples ont produits, sont rejetés massivement en Amérique latine. Ces programmes meurtriers dénommés PAS, PPTE, PRSP, etc., doivent être réprouvés chez nous aussi. Il faut être vraiment machiavélique, véreux et sans humanité pour continuer à croire à ces tragique farces.
Le PRR appelle les togolais à la mobilisation pour rejeter les illusions, l’abdication et l’allégeance aux étrangers de nos hommes politiques. Ce n’est ni dans les bureaux d’un ministre à Paris ni dans les locaux de l’Union Européene à Bruxelles que nous aurons les solutions à nos problémes. En 2003, j’ai proposé dans mon projet de société la gratuité de l’enseignement primaire. Cela doit se faire par la loi et non par décret. Elle doit bénéficier à tous les élèves togolais, dans le public et le privé, pour une question de justice sociale et d’égalité. Nous vivons dans un monde en mode systémique. Il faut donc chez nous un projet de société global et non des annonces désordonnées et des micro-projets sans coordination les uns avec les autres.
Dans l’intérêt supérieur du peuple togolais et en solidarité avec nos autres frères africains, le PRR demande au Chef de l’Etat, Mr Faure Gnassingbé, de convoquer à Lomé une réunion des Chefs d’Etat de l’UEMOA pour adopter une résolution exigeant la révision de ce traité. Ce traité de 1972 est caduc et néfaste à notre développement. Il est temps que nos ministres des finances et leurs collaborateurs travaillent à sa révision pour l’adapter aux réalités que nous vivons. La Banque Centrale Européenne et son homologue américaine (FED) injectent des centaines de milliards d’euros ou de dollars dans leurs systèmes bancaires. Nos banques sont aussi en faillite et ont besoin de liquidités pour aider nos entreprises privées. Il n’y a aucune autorité morale pour s’opposer à une telle mesure. Nous demandons 15 à 20 milliards d’euros pour le refinancement de nos banques en Afrique de l’Ouest et en Afrique de l’est. L’UEMOA a réalisé 3,9% de croissance en 2007 contre à peine 1% en Europe. C’est
donc une question de morale et de justice.
Rien n’est plus pressant aujourd’hui au Togo que la résolution de la question de la pauvreté. Toutes les forces vives doivent être mobilisées pour relever ce défi. Nous devons taire nos critiques stériles et déstabilisatrices. Il est évident qu’aucun parti politique, aussi fort ou aussi populaire soit-il, ne peut relever seul le pays. Il n’y a pas non plus d’homme providentiel. C’est par le travail de tout le peuple et par sa foi dans son avenir que nous parviendrons à relever le défi majeur de notre temps. En conséquence, notre parti affirme que l’unité nationale est la pierre angulaire pour un nouveau départ. Le PRR est prêt à prendre sa part à l’œuvre de reconstruction nationale. Nous apporterons la qualité de notre projet de société, notre connaissance du fonctionnement de l’économie mondiale et notre certitude dans les potentialités du Togo et des togolais. Nous n’avons pas l’habitude de critiquer ou de juger un nouveau gouvernement avant ses 100 jours d’exercice. Mais, nous
assurons que le gouvernement conduit par Mr Gilbert Houngbo est mal parti. Il a presque tout misé sur l’aide extérieure. La déclaration de Mr Louis Michel est incontestablement cinglante pour lui et doit le ramener à la dure réalité. Espérons qu’il changera de sermon et trouvera les moyens de mobiliser et de motiver les togolais pour qu’il le soutienne activement. Que Dieu vous protège et vous inspire.
Nicolas LAWSON
Président du PRR