, lui démocratiquement élu, l'islamiste Mohammed Morsi qui croupit depuis dans une prison.

A l'investituture, les Etats-Unis étaient représentés par Thomas Shannon, conseiller du secrétaire d'Etat John Kerry. L'UE non plus n'y a pas envoyé de représentants éminents, pas plus que la France, qui y était à travers son ambassadeur sur place. Quid des pays du Maghreb ? Aucun n'était représenté par son chef de l'Etat ; en revanche concernant les monarchies du Golfe, qui ont toujours soutenu sans faille un Sissi pourfendeur de Frères musulmans qu'ils redoutent sur leurs territoires, elles ont été, à l'exception du Qatar, représentées au plus haut niveau. 3 pays africains dont le Tchad et le Mali y étaient, symbolisant le retour de l'Egypte dans les instances de l'U.A. Cette faible représentation des Occidentaux, du Maghreb et de l'Afrique noire traduit la gêne de beaucoup de gouvernements provoquée par le retour à la dictature militaire fût-ce en lieu et place du péril islamiste.

La prestation de serment a été faite au pas de course puisque, dit-on, si on exclut les discours introductifs du porte-parole de la Cour et de son vice-président, elle a duré moins de deux minutes.

En comparaison, cette cérémonie diffère par sa solennité de celle, mouvementée, du président destitué Mohamed Morsi ; on se rappelle que celui-ci avait refusé net de prêter serment devant la Haute Cour, puis avait fait évacuer les médias de la salle et exigé que la cérémonie ne soit pas télévisée avant, devant le refus catégorique de la Cour, de le faire, tendu, face aux caméras. Comme si cela ne suffisait pas, il avait de nouveau prêté serment devant les dirigeants de la Confrérie des Frères musulmans et leurs alliés à l'université du Caire.

Pour revenir à la prestation de serment de dimanche, disons que la transmission du pouvoir entre le président sortant, Adly Mansour, qui reprendra son poste de président de la Haute Cour constitutionnelle, et le nouveau président, Abdel Fattah al-Sissi, est une première dans l'histoire de l'Egypte, leurs prédécesseurs étant morts au pouvoir ou ayant été destitués.

Bien qu'al-Sissi ait été élu à près de 97% des voix, c'est, plus que ce taux écrasant d'électeurs ayant jeté leur dévolu sur lui, plutôt le nombre absolu de suffrages qu'il a obtenus qui fait la joie de ses partisans : 23 780 000 sur 24 578 000 bulletins valides. Et savez-vous pourquoi ? Eh bien, il s'agit quasiment du double des voix obtenues en 2012 par Mohamed Morsi. C'est dire que la victoire de Sissi avec son taux pharaonique, pour ne pas dire soviétique, s'apparente à un triomphe, mais si on la replace dans l'histoire électorale égyptienne, des scores encore plus soviétiques que ça étaient légion, ce qu'Alexandre Buccianti de RFI appelle les cinq 9, à savoir 99,999% des voix. De plus, même si les nombres de votants aux présidentielles de 2012 (26,3 millions) et de 2014 (25,5 millions) sont très proches, le taux de participation à ce scrutin, 47% malgré la prolongation du scrutin de quelques jours, est inférieur à celui de la présidentielle 2012 qui avait porté Morsi au pouvoir, soit 52%.

Morsi, depuis sa geôle, peut donc boire du petit lait, surtout que l'appel au boycott lancé par ses Frères musulmans est un des facteurs explicatifs de ce faible taux. Ce qui n'empêchera certainement pas al-Sissi de régner.

Dans son discours d'investiture, Abdel Fattah al-Sissi a promis aux Egyptiens "la liberté" et la "justice sociale" ; il a aussi assuré qu'il garantirait la sécurité dans le pays, où les attaques attribuées aux islamistes ont coûté la vie à des centaines d'agents des services de sécurité les 11 derniers mois. Héritant d'une nation divisée et fatiguée, le nouveau président a d'emblée affirmé que l'économie serait l'une de ses priorités et qu'il construirait 26 nouvelles stations touristiques, huit nouveaux aéroports et créerait 22 villes industrielles.

S'il ne tient pas ses promesses, dans un an ou deux, Sissi, qui sait mieux que quiconque que désormais les Egyptiens tiennent à la satisfaction de leurs attentes, pourrait lui aussi faire face à un soulèvement populaire comme ses prédécesseurs Hosni Moubarak et Mohamed Morsi, dit-on.

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