La Nouvelle Tribune, le seul journal qui refuse d'aller à la soupe et qui oppose à la ligne unique, des informations différentes, plus contrastées et plus équilibrées, vient de subir la dictature d'un homme qui seul, du haut de sa tourelle doctrinale, jette son anathème sur les publications dont le tort est d'être différent.
Quand, en 2000, ce journal publiait son premier numéro, Mathieu Kerekou qui était aux commandes de l'Etat dans son nouveau costume de démocrate, n'avait risqué la moindre action, fut-elle intimidante, à son encontre. Pourtant, l'ex-camarade de lutte qui avait le réseau d'informateurs le plus efficace, qui avait, dans ses placards, des squelettes datant de la période rock'n roll, avait de quoi sévir contre l'orientation éditoriale du journal. Cependant, il avait, envers lui, une attitude d'amusement et de détachement. D'ailleurs vaudrait-il le persécuter et le suspendre qu'il se heurterait aux fins de non-recevoir du président de l'institution d'alors, M. Nata Théophile.
Celui-ci, comme ses prédécesseurs, est resté conforme à une tradition républicaine. La même qu'avait instaurée, sur la base des textes, le premier président de l'institution, Irénée Dossa. L'ancien journaliste et directeur de publication d'Ehuzu, avait une façon de gérer cet organe sans qu'il soit, sous sa coupe, une institution chargée non de reguler le secteur, ni de veiller à l'accès équitable des forces politiques aux médias de service public, mais un pouvoir destiné à sévir contre la presse elle-même.
La Nouvelle Tribune n'a jamais été dans l'excès. Ni dans l'invective, ni dans la vulgarité. Tout le temps, il a offert ses pages à toutes les opinions politiques. Bien plus, au moment où le pouvoir refuse d'ouvrir les médias de service public à l'opposition, il devient l'espace privilégié des minorités marginalisées. Dans les années 2004-2005, le prétendant Yayi Boni y avait exprimé ses points de vue au moment où la majorité présidentielle d'alors ne voulait pas entendre parler de lui et le vouait aux gémonies. En 2015, Patrice Talon y avait régulièrement défendu ses points de vue lors de son bras de fer avec le pouvoir Yayi. Un pouvoir qui trouvait alors insupportable que la NT soit critique à son égard, que les opposants multiplient les points de vue contre sa gouvernance. Jusqu'aujourdhui, on peut toujours y lire les différents articles prenant la défense de l'homme d'affaires.
Mais Adam Tessi n'a pas la majesté du geste contrairement aux fastes de son boubou. Ce qui lui importe, ce n'est ni de s'appuyer sur les textes, ni de respecter la tradition des anciens présidents de l'institution. Il veut plaire, montrer à Patrice Talon qu'il lui est dévoué. Sans doute caresse-t-il l'espoir d'être reconduit à la tête de l'institution à la fin de l'actuelle mandature. Mais sait-il, le Boni, que Patrice Talon n'a nullement besoin qu'il traîne aussi piteusement ses boubous à ses pieds ? Sait-il qu'il met ainsi dangereusement à mal la gouvernance de celui dont il semble défendre les intérêts ? Du président d'une institution noble comme la HAAC, on n'attend qu'une seule attitude: la sagesse. Mais comme Voltaire le dit : « seuls les fanatiques sont zélés, pas les hommes de sagesse »
Florent Raoul Couao-Zotti