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Togo : comment rebondir après 25 années de fraudes électorales ?
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Après une défaite électorale aussi lourde de conséquence politique au regard de notre objectif non-atteint de l’alternance politique au soir du 25 Avril 2015, les Togolais attendent de savoir si une autre organisation complètement différente de l’ancienne désuète et vétuste est-elle envisagée dans un futur immédiat avant d’aborder l’horizon 2020 en passant par les législatives de 2017. Autrement dit, comment fait-on pour réaliser l’alternance politique en 2020 ? En d’autres termes comment fait-on pour ne pas rééditer les échecs de 1998, 2003, 2005, 2010 et 2015 ? Très concrètement, peut-on obtenir l’alternance politique en reconduisant les mêmes leaders qui symbolisent ses échecs répétitifs ? Notre lutte politique togolaise interminable ne souffre-t-elle pas de la non-culture de démission des mandats politiques qui doit sanctionner d’une part les dirigeants corrompus et carriéristes qui ont littéralement échoué et d’autre part du non-renouvellement la classe politique ainsi que nos stratégies mal structurées bien connues d’avance et apprises par cœur par l’adversaire du système RPT-UNIR ?
Nous rendons publiques ces quelques hypothèses de réflexions à l’endroit de notre opinion nationale sur le bien-fondé et de l’évidence plus que nécessaire de la démission des mandats politiques parfois incontournable dans une lutte démocratique pour qu’elle produise des résultats attendus. Un parti politique est-il une SARL familiale, ou c’est une organisation publique d’utilité nationale dont l’activité est exposée au jugement des militants, des médias et des citoyens qui font l’opinion dans sa diversité ?
Notre première hypothèse est un constat d’arithmétique électorale réelle ou supposé prenant acte de la proclamation par la cour constitutionnelle des résultats définitifs de la présidentielle du 25 avril 2015 en donnant à Faure Gnassingbé 58,77% et à Jean-Pierre Fabre 35,19%. Aussi doit-on constater que le système fera progresser Fabre de 0,75 point en 5 ans. Rappelons qu’il avait fait un score de 34,94 % à la présidentielle de 2010. Selon les logiciels de programmation informatique s’agissant des suites arithmétiques de fraudes électorales proportionnelles à l’évolution du corps électoral et autres tripatouillages du fichier électoral, Fabre gagnera 7,5 points dans 50 ans et son score de 34,94 % en 2010 passera à 42,69 % en 2065. Ce qui signifie qu’il n’y aura pas d’alternance politique les 10 prochaines présidentielles qui sont fraudées d’avance si Fabre se maintient bon gré mal gré comme principal challenger à vie du candidat du pouvoir. Il lui appartient de tirer les conséquences politiques de ses deux mésaventures électorales infructueuses de 2010 et de 2015.
Dans une deuxième hypothèse non moins négligeable qui appui notre première hypothèse, faisons-nous une comparaison quoique exagérée entre le leader de l’ANC et le leader du Parti travailliste britannique Edward Miliband qui venait de perdre les législatives du Royaume uni en obtenant 230 sièges contre 326 au premier ministre sortant David Cameron du parti conservateur. A l’issue du vote des Britanniques son parti fut proprement laminé y compris dans les bastions écossais qui lui étaient traditionnellement favorables. Rappelons qu’Ed Miliband, jeune leader de 45 ans à la tête du Labour party depuis 2010 fut personnellement réélu dans sa circonscription de Doncaster. Mais contraint de voir son adversaire historique conservateur conforté, voire renforcé, il démissionna de la tête du Parti travailliste en prenant « l’entière responsabilité de la défaite ». Et de poursuivre devant la presse britannique : « Il est temps qu’un nouveau leader prenne le relais ». Cela s’appelle du bon sens politique dirons-nous simplement. Quelle maturité politique !!!
En tout état de cause l’objectif de l’alternance politique que les Togolais attendent de l’ANC demeure non-atteint à ce jour et risque de durer encore longtemps si nous ne changeons pas de billes ainsi que les mêmes joueurs de billes usés et fatigués par une si longue lutte. Il nous parait utile d’insister sur l’intelligence du modèle politique anglo-saxon qui réussit dans bon nombre de pays africains comme le Ghana, le Kenya, la Tanzanie, l’Afrique du sud, la Namibie, la Zambie, le Nigeria etc….au lieu de s’appesantir sur le système francophone déclinant dans lequel Sarkozy revient par la petite porte malgré les mises en examen réelles et potentielles.
Dans les circonstances actuelles de notre opposition togolaise en piteux état, devrons-nous nous résoudre à subir les fraudes électorales répétées du RPT-UNIR tous les 5 ans en lieu et place d’une lutte intelligente, restructurée et non-instrumentalisée par les mêmes leaders à des fins carriéristes sans produire aucun résultat ? Comment cela est-il possible de reconduire les mêmes vétérans en situation d’échec scolaire dont le redoublement est garanti à chaque examen de fin d’année ?
La troisième hypothèse recommande l’impératif d’une opposition nouvelle, rajeunie, non-radicale mais ferme, qui parle d’une seule et même voix, à savoir une stratégie commune basée sur la rédaction d’un programme commun de gouvernement. Une opposition pragmatique dont le seul objectif reste et demeure l’alternance politique pour tous les Togolais. Une nouvelle opposition imprimée par les masses populaires togolaises et par notre diaspora qui reflète de nouveaux visages issus de différentes sensibilités ethniques qui rende possible cette Union Nationale de l’Opposition Togolaise y compris l’UFC pour le symbole qu’elle incarnait avant 2010. Pour qu’elle advienne en toute efficacité, elle doit naitre des assises d’une transformation politique entre tous les partenaires de l’opposition en tant que membres égaux de la nouvelle organisation dans les règles absolues d’un fonctionnement statutaire et démocratique.
La dernière hypothèse résulte du fait que le Togo appartient à tous les Togolais dont la grande majorité souhaite l’alternance politique, alors il faut marteler haut et fort que notre lutte politique relève d’une requête à caractère national. Braqué d’un côté par le pouvoir RPT-UNIR à cause de son inflexibilité et de l’autre côté par les autres partis politiques de l’opposition qui se sentent méprisés et humiliés, ainsi que l’opinion nationale qui ne comprend plus rien, le leader de l’ANC a fini par ruiner son capital politique en offrant une mine d’or largement exploitée par l’adversaire RPT-UNIR auprès de la communauté internationale pour évoquer « des risques d’incertitudes socio-politiques en cas d’alternance politique dans notre pays » ? Ce qui valide la suspicion d’un agenda revanchard caché dans les entrailles du parti et de son président national.
Par Tido BRASSIER | Paris, le 12 Mai 2015 -| Militantisme & Démocratie
Merci à vous tous qui m’aviez écrit par rapport à la vidéo sur le boycott de la France. Je ne pourrai malheureusement pas vous répondre tous individuellement.
Pour les demandes d’amis, je ne pourrai en accepter plus également car sur Facebook, il y a une limite sur le nombre d’amis que l’on puisse avoir. Mais sachez que vous n’avez pas besoin d’être mon ami sur Facebook pour boycotter la France ou résister contre elle.
A tous les français qui se disent offensés par ma comparaison de leur pays aux nazis, sachez que c'est plutot à ceux-ci de se facher car vos dirigeants sont pires que les nazis. Les 6 millions de juifs que les nazis ont décimés sont le cinquième du nombre d’africains que la France a massacré. Alors sachez que vous traiter de nazis est un grand compliment car les actes ignominieux de votre nationette en Afrique aurait fait tremblé Hitler.
Je suis heureuse de voir que nous sommes très nombreux à en avoir marre d’être exploités, dominés et oppressés par la France et il faudrait que chacun de nous joue sa partition pour mettre fin à ce cycle infernal.
Trop de sang, de larmes et de sueurs d’africains ont coulé et continuent de couler pour satisfaire les intérêts égoïstes de la France qui ne réalise toujours pas qu’elle aurait plus à gagner en étant ami des peuples les plus riches de la planète sans lesquels, elle ne saurait subsister.
Il est certes vrai que la France n’est pas la seule « puissance » oppressive du monde mais pour nous autres, la France est notre prédateur le plus dangereux et nous devons renforcer nos défenses contre elle. Elle dévore nos parents, nos enfants, nos ressources et nous avons le devoir de nous battre pour la survie de notre peuple.
Nous n’avons pas d’armes à feu pour combattre la France parce que nos ancêtres ne furent pas assez sauvages pour nous apprendre à fabriquer des outils de meurtres massifs. Toutefois, notre arme la plus redoutable demeure notre pouvoir d’achat. Quand les 500 millions d’africains ressortissants des pays dominés par la France n’achèteront plus rien qui soit produit par cette nationette, elle repensera sa politique étrangère vis-à-vis de l’Afrique.
Un adage africain dit qu’on ne mord pas la main qui nourrit. La France ne nous a pas que mordu ; elle nous a dévorés sans pitié et nous devons bloquer sa digestion.
Togo, présidentielle 2015 : Fraudes massives et coups de pouce de mé...
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Togo, présidentielle 2015 : Fraudes massives et coups de pouce de médias français, les dessous de cartes
Max Savi Carmel et Edem Assignon, Paris, 19 mai 2015
Aux vues et aux sues du monde entier, Faure Gnassingbé a réussi son énième tripatouillage électoral. Cette fois-ci avec le soutien, à peine voilé de médias français. Comment et par qui a été organisée la fraude? De France 24 au Monde, de Jeune Afrique à l’AFP, quels rôles ont joué les médias de l’hexagone ? Deux semaines après les résultats définitifs, Afrikaexpress a mené son enquête.
Afrikaexpress a déployé lors de cette présidentielle, plusieurs équipes de journalistes dans tout le pays. Cette enquête est le fruit de leur travail mais aussi celui d’une série de témoignages vérifiés par nos services. Dans plusieurs cas, nos journalistes ont été eux-mêmes témoins de la fraude et de ses méthodes. Quant aux privilèges financiers accordés par le régime à la presse française, ils font objet, depuis 2008, de longues enquêtes de la part de la rédaction de Tribune d’Afrique puis d’Afrikaexpress. Les informations obtenues sont résultants d’indiscrétions de personnes près du dossier ou de témoins qui, à visages découvert se sont confiés à notre rédaction.
Décor. Ceni (Commission électorale nationale indépendante), organe en charge de l’organisation de la présidentielle au Togo. Sur ses 17 membres, au moins 10 sont acquis au pouvoir, et à ce groupe 2 autres se sont ralliés rapidement. Seulement 5 sont proches de l’opposition avec leur tête,Francis Pédro Amuzun, plus excité qu’équilibré. La Cour constitutionnelle, l’institution chargée de valider les résultats annoncés par la Ceni : ses 9 membres sont nommés par Faure Gnassingbé et les députés à l’Assemblée nationale où il est majoritaire. Unir (Union pour la République), nouvelle dénomination du Rpt (Rassemblement du peuple togolais) qui a dirigé le Togo depuis sa création en 1969 jusqu’à sa dissolution en 2011. Cap (Combat pour l’alternance politique) en 2015, alliance de plusieurs partis et mouvements soutenant la candidature du principal opposant, Jean-Pierre Fabre. Il regroupe l’essentiel de l’opposition, à l’exception du CAR (Comité d’action pour le renouveau) de Me Yawovi Agboyibo, connu pour sa promiscuité avec le pouvoir, et du mouvement Tchoboe qui réfute tout scrutin sans réformes, appelant au boycott.
Faure Gnassingbé. Au pouvoir depuis 2005 à la suite d’une présidentielle qu’il a lui-même qualifiée « d’épouvantable » lors de laquelle, des milices proches de son parti ont massacré des centaines de civils dans tout le pays, notamment à Lomé et dans la région des Plateaux selon un rapport de l’Onu (rapportDoudou Ndiène). Après deux mandats tous contestés, il s’est engagé pour un troisième qu’il a décroché sans difficultés, avec une immense fraude orchestrée avec le soutien d’hommes d’affaires, d’anciens barons du Rpt et de l’armée.
Jean Pierre Fabre. Chef de file de l’opposition, il combat la dynastieGnassingbé depuis 30 ans. A défaut d’être candidat unique, cet ancien professeur de statistiques qui a réussi à éloigner de lui plusieurs leaders de l’opposition dont Agbéyomé Kodjo(ancien Premier ministre, passé entre temps dans l’opposition mais aujourd’hui attiré par le faurisme), est désigné candidat de Cap 2015.
Général Siaka Sangaré. Officier malien et expert des élections en Afrique. Il préside le comité de suivi pour le compte de l’Organisation internationale de la francophonie (Oif). Son arrivée a fait suite à une contestation du fichier électoral par l’opposition togolaise. Il éliminera 100.000 votants en doublon contre plus de 300.000 à 500.000 suspectés. Les experts de l’Oif reconnaitront eux-même que le fichier n’est pas « fiable mais consensuel ». Du jamais entendu dans une démocratie !
Gerry Komandéga Tama (ancien militaire), Aimé Gogué Tchaboré(professeur) et Mohamed Traoré Tchassona (notaire) sont les trois autres candidats à la dernière présidentielle. Les résultats officiels les ont crédités de 6% des suffrages exprimés. Dans ce contexte, le scrutin n’opposait que deux grands candidats : Jean-Pierre Fabre etFaure Gnassingbé. Le dernier est proclamé vainqueur par des institutions à sa botte avec 58% des voix alors que son challenger réclame comme à l’accoutumée une courte victoire. Décryptage et perspectives !
Fraudes massives, irrégularités abondantes, désorganisation avérée !
Derrière l’extraordinaire calme et sérénité qui a prévalu lors de la présidentielle du 25 avril dernier, se cache une toute autre réalité. Plusieurs formes de fraudes ont été constatées dans tout le pays. A l’exception de Lomé, la capitale, où la participation a été à peine passable, dans toutes les autres préfectures ou presque, il y a eu des irrégularités, des pressions directes et surtout, des bourrages d’urnes. C’est le cas dans la Binah (nord-est du Togo), très favorable au pouvoir depuis un quart de siècle (le défunt dictateur Eyadéma Gnassingbé obtenait 100% des voix et son fils Faure n’échappe point à des scores soviétiques). Un reporter d’Afrikaexpress a constaté de visu, dans le canton de Kémérida-Kétao, des distributions de billets de banque, notamment derrière la gare de Kétao, vers la mi-journée. Des recoupements révéleront plus tard que ce sont des étrangers venus voter qui se partagent leur cagnotte. Une cagnotte offerte parMassina Yotrofeï, décrié pour son présumé passé de bourreau à l’Agence nationale des renseignements (Anr) et qui dirige depuis quelques mois la gendarmerie nationale.
Trois témoins attestent que la langue parlée par ces votants mystérieux est proche du dendi, populaire au nord du Bénin et du fon, principal dialecte dans le pays voisin. Une certitude : plusieurs centaines de votants qui ont reçu leurs liasses de billets ne parlent pas le kabyè, dialecte du terroir. Pire, des voitures les ont convoyés vers Kara juste après. Contactée, la préfecture de la principale ville du nord du Togo, dit n’avoir « rien entendu de pareil ».
Mais, une conséquence de cette fraude révélera le subterfuge. Un dépassement de « 1120 voix » a été constaté par la Céni dans cette localité. Après le bourrage d’urnes et le vote des étrangers, des représentants de l’opposition ont été chassés de plusieurs bureaux de vote situés autour de la préfecture de Pagouda. « Beaucoup d’entre eux ont été remplacés par des militants du parti au pouvoir », selon des témoins crédibles. « Généralement, nous votons en paix ici et pour le parti au pouvoir, cette fois-ci, je ne comprends rien, les fraudeurs sont venus nous envahir« , avoue avec amertume à Afrikaexpress, un gendarme de la Fosep. Ce qui est certain, le cas de la Binah a provoqué un houleux débat. La Ceni favorable au pouvoir, demande que la Cour constitutionnelle s’en charge. « Jamais ! », ont rétorqué des représentants de l’opposition qui demandent que le vote de cette préfecture soit annulé. Finalement, il ne le sera pas.
Mais la Binah ne détient pas le monopole de la fraude. Un communiqué de Cap 2015 fait cas de dysfonctionnements avérés dans une vingtaine de préfectures. Et pour une fois, l’opposition togolaise a fait preuve de précisions étonnantes. Dans le courrier de Jean-Pierre Fabre à la Céni, le candidat identifie des formes de fraudes et localise leurs zones d’effraction. Par exemple, dans le Dankpen, des bulletins estampillés « SPECIMEN » ayant servi à la campagne ont été retrouvés dans les urnes. Preuve sans doute que dans la précipitation de bourrage d’urnes, il y a eu recours à des bulletins d’essai. Le courrier évoque 17 bulletins. « Il pourrait y en avoir quelques centaines, à Dankpen et à Guérin Kouka », selon un observateur de la Cédéao qui a échangé au téléphone avec Afrikaexpress. Le Cap 2015 constatera même que dans au moins une préfecture, le nombre d’urnes était supérieur à ce qui était déployé. Une autre démonstration de fraudes à l’aide d’urnes fictives.
Autres localités, autres méthodes : le Yoto, le Zio et le Bas Mono. Distribution massive de cartes d’électeur et achat de conscience notamment dans les hameaux reculés. « Avez-vous déjà voté ? Sinon j’ai des cartes », s’est adressé un jeune homme à deux reporters d’Afrikaexpress, ahuris, à Tokpli. Sans aucune gêne, il a réussi à faire voter au moins une dizaine de personnes. Un électeur a même accompli son ‘’devoir civique’’ avec une carte de femme avec la bénédiction du président du bureau de vote. Les journalistes ont vainement tenté de solliciter l’intervention du gendarme de la Fosep : « je suis seul et je ne peux rien », répondra l’agent. Désarmant !
L’armée à la manœuvre
Pour plusieurs observateurs, la nouveauté dans ce scrutin réside dans la préparation, en amont des fraudes. A part la bourde de la Binah, la fraude n’est pas le fruit d’une précipitation et de l’improvisation. Elle a été planifiée de fond en comble. Depuis que Pascal Bodjona, ancien puissantissime ministre et cerveau des fraudes a été jeté en prison par Faure Gnassingbé dans une rivalité politicienne, c’est au sein de l’armée que se trouve la nouvelle machine. Des sources concordantes ont révélé qu’au moins 1800 militaires de divers grades étaient représentants du parti au pouvoir dans les bureaux de vote au nord du pays. Certains parmi eux ont été bien formés à la fraude. Malgré leur fermeture officielle, ils ont réussi par exemple, à faire entrer par plusieurs postes-frontières du pays, des étrangers le jour du scrutin. A Kétao, au moins 16 camions remplis de votants béninois ont traversé la frontière, à Cinkasé, limitrophe du Burkina Faso, les étrangers sont arrivés au Togo deux jours avant et ont été soigneusement logés. Selon des témoins, plusieurs cadres de Unir (pouvoir) les ont logés et le coût de leur séjour a été pris en charge par Noupokou Damipi, sulfureux ministre des Mines qui a multiplié des scandales de corruption sans jamais être inquiété. Il est redevable à Faure Gnassingbé.
Tout au long de la frontière ouest avec le Ghana, l’opération a été minutieusement organisée. Que ce soit du côté de Kidjaboum, Katchamba, Guérin Kouka ou Bassar, les populations sont presque identiques des deux côtés de la frontière. Les acheminer par milliers n’a posé aucun problème. Venus par Tindjassé et Yégué, ces ‘’votants d’un jour’’ ont été convoyés par camions et logés par la préfecture de Wawa. « Tout a été planifié par l’armée », ricane une source proche de la Grande muette, sous couvert de l’anonymat. Les regards se tournent vers le Camp Landja de Kara et celui de Témédja dont quelques centaines de pensionnaires se sont retrouvés en mission « non mentionnée » pendant toute la période électorale.
Dans la région des Plateaux, des cas de bourrage d’urnes ont été répertoriés notamment dans des zones rurales où dominent les populations allogènes, tous favorables au parti au pouvoir. Dans la ville d’Atakpamé, essentiellement acquise à l’opposition, des quartiers entiers ont été vidés de leurs populations. « Vers le Ghana notamment et quelques-uns vers le Bénin« , selon un constat de Afrikaexpress, ce qui a justifié que malgré une mobilisation importante dans les milieux ruraux (mobilisation attribuée à tort ou à raison aux bourrages d’urnes), le centre-ville ait battu tous les records d’abstention. Plus de la moitié des votants ne se sont pas déplacés. Et pour cause, les violences de 2005 ont rattrapé les mémoires. Cette année-là, cette ville avait connu un massacre soigneusement orchestré par des milices proches du parti au pouvoir. Alors qu’à quelques jours de la présidentielle, des cas de violences ont été signalés à Djerehouyè (où s’est rendue une équipe de Afrikaexpress) et à Gléï puis vers Nangbéto, la panique a saisi la ville qui s’est vidée de ses habitants. Une situation volontairement provoquée par le régime pour vider les poches de l’opposition de leurs votants potentiels. Opération réussie !
Dans les casseroles togolaises des médias français
Les relations, souvent incestueuses, parfois scandaleuses ont toujours existé entre les dictatures africaines et les médias français. Notamment le Togo, une dictature exceptionnelle, avec quelques traits de démocratie, des semblants d’institutions, une forme de liberté d’association et d’information. Le tout dissipant les dessous moins catholiques. Mais pour cette élection, le rôle et l’implication des médias hexagonaux ont été soigneusement préparés par deux barons du régime. Gilbert Bawara, ministre de l’Administration territoriale qui a de bonnes relations avec Le Mondeet Jeune Afrique et Cléo Essodeina Petchezi, secrétaire général adjoint de la présidence, chargé de la communication qui peut compter sur sa filière France 24(avec Emmanuelle Sodji notamment) etRfi. Entre les deux, la directrice de cabinet, Victoire Tomégah Dogbé qui gère les gros budgets de communication, plutôt avec des sociétés américaines qui ont réussi, à insérer à prix d’or, quelques pages sur le Togo dans de petits journaux américains. Elle tient aussi la phase Europe, notamment pour la France où elle a pu obtenir aussi bien dans l’Express que le Point des insertions maladroites (celle du Point portait moult erreurs et une chaine de coquilles). A cela s’ajoute la sulfureuse filière Jeune Afrique.
Connu pour sa légèreté et ses acrobaties avec l’argent des dictatures, le magazine panafricain sait surfer sur les périodes électorales. Avec Danielle Ben Béchir, l’épouse du fondateur qui téléguide tout depuis Paris. Les grandes interviews sont confiées soit à son fils Marwane ou àFrançois Soudan, le fidèle des fidèles. Pour les articles habillement publicitaire, Georges Dougueli est le coursier idéal. LA machine fonctionne bien avec les nouvelles recrues qui ont compris le code : le commercial d’abord, le journalisme ensuite. Et souvent, le journalisme, le vrai, n’arrive jamais. Mme Dogbé peut, pour ces coups, puiser allègrement dans les 2 millions de dollars disponibles grâce au budget et à la traditionnelle caisse noire mais aussi les raquettes auprès de sociétés d’Etat. Il suffit d’appeler le directeur d’une société d’Etat et de lui demander un coup de main pour « la com présidentielle » que c’est fait aussitôt. Et pour le scrutin du 25 avril dernier, ça a marché !
Les médias internationaux ont tôt fait d’annoncer la victoire de Faure Gnassingbé. Internationaux ? Disons plutôt France24 dont la correspondanteEmmanuelle Sodji à Lomé a surpris par sa magie. Elle doit être d’une classe exceptionnelle de devins pour savoir, au soir du 25 avril que le président sortant est favori, puis, s’est retrouvé ‘’largement en tête sur toute l’étendue du territoire’’. Information mystérieuse d’autant que jusqu’à 4 jours après, aucun résultat fiable n’est encore sorti. La Céni cafouillait encore.
Collaboratrice de TV5 Monde et deFrance 24 dans la région, Emmanuelle Sodji a souvent fait preuve de retenue. Qu’est-ce qui l’a poussé aussi loin ? Un coup de main, murmure-t-on à la présidence et qui dit coup de main dans le langage tropical dit argent, parfois beaucoup d’argent. Elle sera attaquée sur les réseaux sociaux et par des confrères locaux qui ont avancé des sommes dont Afrikaexpress préfère taire le montant, sans preuves. Mais, toujours est-il que sa précipitation à annoncer, avant la Céni,Faure Gnassingbé gagnant a de quoi surprendre ! Radio France Internationale(avec Olivier Rogez) y va plus ou moins sérieusement et rigoureusement. Son correspondant local a été mis à l’écart, sa promiscuité avec le régime n’est plus que secret de polichinelle. Dans la soirée du lundi 26, plusieurs journalistes vivant en Europe et proches de Gilbert Bawara ont annoncé sur les réseaux sociaux et dans certains médias que Faure Gnassingbé est largement en tête. Au Quai d’Orsay, le ministre togolais de l’Administration insiste pour qu’un communiqué appelle, non seulement Jean-Pierre Fabre au calme mais « prenne acte » au moins de la situation. Peine perdue. L’attente sera longue. En rencontrant le président de la République quelques heures plus tard,Gilbert Bawara se laisse aller, « La France a reconnu notre victoire, les médias français notamment ». Une manière de calmer un chef d’Etat qui a, pour cette fois-ci, débourser quelques millions d’euros pour des journalistes dont certains sont de fantômes. Mais M. Bawara n’a pas que des fantômes dans son carnet d’adresses à la page des médias, il a un contact qui lui sauvera la face. Christophe Châtelot. Ce n’est pas l’ami direct du ministre. Il est le filleul d’un autre « bitosard », terme pour désigner les journalistes corrompus en Afrique.Philippe Bernard. L’incarnation même de l’affairisme dans le métier. Tiens, il est en poste à Washington. Pendant le conflit qui a opposé le président togolais à son frère cadet qu’il accusera à tort de tentative de coup d’Etat, il prendra position pour Le Monde. Avec Yérim Seckpour Jeune Afrique. Copains du ministre de la Coopération (poste occupé précédemment par Gilbert Bawara), ils sont accueillis chaque fois qu’ils atterrissent au Togo. Hôtel, véhicules, parfois quelques donzelles tropicales pour les plus viriles. Et toujours la cantine de bois, la petite caisse d’argent pour dire « au revoir et merci ». Le Français et le Sénégalais savent mieux que quiconque que les cadeaux ne se refusent pas sur le continent noir. Comme Philippe Bernardn’est plus dans la danse, Christophe Châtelot le remplace bien, avec des articles si favorables qu’on se demande si certains ne lui sont pas écrits par la cellule de communication de la présidence togolaise. Contrairement àPhilippe Bernard qui a récolté entre 600 et 800.000 euros en une année (2009 et 2010) auprès du seul ministre Bawara, selon une indiscrétion de ce dernier, deChristophe Châtelot, on ne saura rien. Juste des relations trop poussées avec le régime avec à la clé, le constat que « Faure était très populaire » et que l’opposant perdant est « un homme seul », comme s’il n’a pas suivi ses campagnes. Faut-il alors s’étonner que, le 2 mai 2015, Christophe Châtelot ait repris le message transmis par l’Afp le 30 avril comme quoi l’Onu avait qualifié le scrutin de « crédible, libre et transparent », en ajoutant que le « constat » était « partagé par les autres observateurs internationaux et nombre de diplomates étrangers de Lomé » en oubliant le Comité d’accompagnement et le général Sangaré et sans considération pour la valeur des observations citée par l’ONU?
Quant à Jeune Afrique, il couvrira tout le processus électoral dans le sens qui avantage son « partenaire », le président sortant qui n’a pas hésité à sortir un demi-million d’euros pour une interview qui sera utilisée en extraits dans un article tout à la gloire de Faure Gnassingbé. François Soudan a passé du bon temps avec le chef de l’Etat togolais. Réception dans une résidence cossue à la plage, une maison que Faure Gnassingbén’utilise que pour des hôtes de marque. Il sera reçu ensuite au bureau en plein protocole avant de finir au domicile. Surprenante intimité entre un journaliste et un chef d’Etat au point où dans la livraison suivante du journal, on confondrait son papier avec un article du bulletin d’information du parti au pouvoir. Les consignes seront données pour que les sociétés d’Etat lui complètent le demi-million manquant, selon une source militaire très crédible. C’est l’habitude à Jeune Afrique, en tout cas. Et, tous les articles du journal iront dans le même sens, comme s’ils étaient censurés par Lomé.
De tout ce qui précède, il est certain que gagnant ne peut se prévaloir de la légitimité. L’opposition notamment Jean Pierre Fabre appelle au recompte des voix, position partagée par plusieurs partis politiques de la gauche française. Si le cafouillage de la Ceni ne permet pas de désigner Fabre comme vainqueur, la victoire de Faure gonfle le doute. Compte tenu du contexte international fragile, avec les menaces terroristes, Paris a dû en prendre acte. La communauté internationale n’ayant jamais fait confiance à l’opposant dont le programme politique est aussi flou que le style de gouvernance. Mais ce scrutin, trop vite salué par l’Organisations des Nations Unies, ONU et l’Organisation internationale de la Francophonie de même que plusieurs démocraties occidentales dont la France remet en doute la crédibilité de ce qu’on appelle communauté internationale et qui, sur le continent africain fait du deux poids deux mesures. L’opposition togolaise a lancé une série de manifestations qui ne suffiront sans doute pas à remettre en cause la victoire de Faure Gnassingbé. Mais dans une situation à la togolaise où l’opposition est plus que fragilisée, la presse déshydratée et la société civile éreintée, la surprise peut venir de partout. Comme au Burkina Faso où personne n’a rien vu venir. Le régime ne devrait se croire à l’abri de rien !
MAX-SAVI Carmel, Paris, France
Edem ASSIGNON, Paris, France
afrikaexpress.info
Ou pour parler comme le psalmiste :
« Pourquoi les nations ont-elles été en tumulte
et les communautés nationales n'ont-elles cessé de marmonner une chose vaine... »[1]
Tout le monde au Togo semble d'avis que c'est maintenant le temps de la réflexion. Mais quelle réflexion? J'avoue que venant de certains acteurs politiques dans notre pays, ce n'est pas seulement avec ironie que je prends la chose. C'est aussi avec un certain frémissement, car, en fait, nous n'avons jamais cessé de nous livrer à la réflexion au Togo, témoin déclarations, communiqués, articles, réunions et congrès de partis, conclaves, concertations, science, et même dialogues, choses que l'on ne fait jamais sans réflexion, jusqu'aux nombreux groupes déclarés, supposés, présumés, soi-disant, nommés de « Réflexion ». Il y en a de toutes les nuances. Mais , remarquez surtout la majuscule. En fait, Dame Réflexion ne nous a jamais quittés au Togo. Elle a été, est et sera toujours avec nous. Mais, alors, pourquoi trouvons-nous, seulement maintenant nécessaire d'aller la chercher, peut-être là où elle n'est pas? Zinsou a une tendance différemment appréciée, à se moquer de nous : « Quand nous allons chercher quelque chose, c'est que nous savons bien où elle se trouve ». J'en conviens! Cela signifie aussi que nous savons ce que nous allons chercher dans les urnes et ce que nous n'y cherchons pas. En effet, selon l'angle sous lequel on se place, on y cherche ce qu'on a déjà, ou on y cherche ce qu'on ne trouve jamais, dans les conditions où nous nageons, l'état dans lequel nous sommes tous plongés. Peut-être que si ces conditions changeaient, si cet état changeait, nous pourrions, pour ceux qui y cherchent ce qu'ils ont déjà, nous épargner les peines ( notamment celle de bourrer les urnes, de les charger sur la tête ou de les fourrer sous l'aisselle et de courir) le tumulte, l'argent de la nation gaspillé, la salive répandue inutilement, tout comme le sang des adversaires tailladés à la machette, les bagarres, les cadavres, la comédie macabre, mimique et tout compris qui nous fait paraître aux yeux du monde comme de mauvais comédiens, de méchants joueurs...nous pourrions nous épargner tout cela donc : c'est si simple! Il suffit de déclarer à la face du monde que le Togo est une monarchie héréditaire qui n'a pas besoin d'élections pour vivre en tant que nation; nous n'éviterions pas seulement le tumulte pour une chose vaine aux Togolais, nous l'éviterions aussi pour les nations autour de nous, les organisations et institutions, les puissances du monde...jusqu'au Pape qui doivent faire semblant de nous aider à faire la démocratie. Alors que nous savons pertinemment que nous allons aux élections pour...cracher sur la République, uriner dans les urnes ( je ne fais aucune allusion à une dénomination, puisque les militants de ladite dénomination ne sont pas seuls à s'y défouler) enfin dépouiller la démocratie de toutes valeurs, de tous sens, piller, dilapider, gaspiller les biens du pays...
Et pour ceux qui y vont chercher ce qu'ils savent ne jamais trouver dans l'état actuel? Mais qui y vont avec peut-être la même énergie, la même frénésie, en couleur comme ceux qui voient la chose sous une autre couleur, d'un autre angle de vue? Eh bien, la particularité de notre réflexion est qu'elle évolue, je ne dirai pas au gré des circonstances, mais dans un ordre, soit croissant, soit décroissant, plutôt décroissant que croissant. Comme par exemple : « pas de réformes, pas d'élections », puis élections quand même. Ou « cette fois, le hold up ne passera pas »; puis quand le hold up semble évident, « ce hold up est le dernier ». Je ne sais pas si « le dernier » signifie ce qui n'est pas passé, comme je l'espérais. Mais il y a certainement mieux, ou pire, selon l'angle sous lequel on se place toujours, car parfois le meilleur et le pire sont confondus : « Votez utile! » et quand, comme tout homme qui réfléchit honnêtement le sait, on a voté inutile, on confie les clés de la Maison Togo à celui en faveur de qui ce tumulte inutile, cette chose vaine a été organisé. La question n'est pas dans l'inutilité ou l'utilité du vote ( chacun a le droit de se placer sous l'angle de vue qui l'avantage). Mais, c'est l'inutilité de l'expression que l'on croyait être une trouvaille sensationnelle ( d'ailleurs celui qui l'a faite est un spécialiste de ce genre de trouvailles et il se fait toujours désirer, entretenant un faux suspense, pour nous les brandir les unes après les autres ). Comment voulez-vous, quelle utilité trouvez-vous à offrir ( qui vous a élu pour) les clés de la Maison Togo à celui qui s'en empare comme il veut, par la force, la violence, massacrant qui il veut, s'il ne peut pas se l'approprier par la ruse et la fraude? Quelles clés donnez-vous à celui qui a déjà forcé la porte de la Maison en question et s'y est installé?Qu'on ne nous fasse pas rire! Je ne veux plus rappeler l'autre belle trouvaille du même spécialiste, expert en science politique qui veut « renouveler la classe politique », mais en offrant d'abord les clés de la Maison Togo au représentant d'un clan qui a pris ces clés par la force depuis plus de cinquante ans. On va de l'avant, on fait du neuf en s'acharnant à maintenir l'ancien. La tendance, ce me semble, est celle-ci : à mesure que nos réflexions, je veux dire nos déclarations, communiqués etc. se multiplient, s'alignent, s'allongent, s'essoufflent, s'abandonnent à des soubresauts d'agonisants, ils perdent naturellement de leur force. Et meurent. Ou s'il en reste quelque chose, ce ne sont plus que ces soubresauts, ces agitations.
Ces agitations que nous voulons faire passer pour du mouvement, ce tumulte pour la chose vaine que nous présentons comme science, la communauté internationale les regarde comme une comédie, je l'ai dit, et du moment où cette comédie ne la dérange nullement dans ses intérêts, dans cet apartheid où sont rejetées des nations comme la nôtre, sans trop s'en mêler. C'est normal! Ce qui n'est pas normal, c'est que nous regardons, nous vers cette communauté, ces organisations, comme nos sauveurs, ou au moins devant contribuer à notre salut. J'ai lu aussi une déclaration de Jean-Pierre Fabre s'en remettant au peuple togolais et à l'OIF pour que sa victoire aux élections du 25 avril lui soit reconnue. Doit-on dire : « Pauvre Jean-Pierre Fabre? ». Il sait que ni l'OIF, ni l'UE, ni la CEDEAO, ni l'UA, ni l'ONU...ne viendront le faire Président de la République togolaise, lui remettre les clés de la Maison Togo. C'est qu'il faudrait que la République togolaise, elle-même existe d'abord, que la Maison Togo soit d'abord. Or, il n'échappe à personne réfléchissant sainement, qu'en matière de République togolaise, de Maison Togo, nous n'avons rien que l'on puisse valablement appeler de ces noms. Il n'y a à la place que la Maison Gnassingbé. Qui veut travailler pour cette Maison, de l'extérieur ou à l'intérieur est le bien-venu. Ne dites pas autre chose. A l'intérieur, nous formulons allègrement, à ceux qui s'amusent à nous observer de l'extérieur, comme dans une pièce connue de certains Togolais :
« Une demande d'aide aux comédiens sous-développés: Messieurs les...j'ai l'honneur de vous prier très respectueusement, avec le respect le plus respectable, de bien vouloir nous accorder une assistance technique, en acceptant de participer à notre petite comédie qui fait un grand effort, pour sortir du sous-développement![2] ». Et ces messieurs généreux acceptent. Et ils participent! Seulement, cela demeure notre comédie. Il ne nous restera plus qu'à nous répandre en gratitude et louanges devant ces messieurs, quand la comédie tournera en tragédie, comme les comédiens dans la même pièce:
« Merci papas qui fabriquez gros canons boum! Boum! ». En attendant, nous voulons conserver notre Maison ou si vous voulez, notre comédie, telle quelle, parce que, quoi qu'il en soit, nous gagnons. Nous y gagnons tous, d'une manière ou d'une autre. A défaut d'être président, nous pouvons être...ministres? Députés? Sénateurs? Maires? Non! On dirait que ce bonhomme de rien du tout nommé Zinsou a tout vu ou tout prévu : « l'Ami-de-Celui-qui-vient-Directement-Après-Le-Directeur [3]». C'est un titre! Un titre! Un titre bien long que l'on puisse encore prolonger pour en retirer le maximum d'avantages! Même le plus dépourvu de valeurs réelles, même le plus ridicule, pourvu que ce soit un titre! Et qui sonne bien! Après tout, c'est humain d'aspirer à posséder un titre, un statut dans la société. Mais ne dites pas que c'est pour assouvir cette soif de statut que nous faisons la politique. Eh, dites-moi, quel est l'Homme-qui-vient-directement-après-le-Menteur National? A défaut d'être l'Ami de ce Menteur National lui-même...dans ce contexte où le mensonge est roi, en tout cas fort prisé, bien récompensé... ne serait-il pas légitime de...? Ernerst Renan a écrit : « En politique, il n'y a que les fondations barbares qui durent. [4]». Pour les politiciens désireux de faire une carrière bien longue et bien rémunérée, n'est-il pas plus avantageux d'être du côté d'un système qui répond à ce critère? Et en matière de barbarie, le système Gnassingbé, depuis son crime fondateur, jusqu'aux fraudes électorales d'aujourd'hui, en passant par les massacres de populations, les assassinats d'adversaires, les actes de piraterie de l'air, les incendies volontaires d'édifices d'utilité publique, n'a rien à envier aux plus sombres du genre, connus par le passé ou aujourd'hui.
« Fous-nous la paix, Zinsou. Nous voulons réfléchir! »
Sénouvo Agbota ZINSOU
[1]Psaumes 2:&
[2]Saz On joue la comédie, Prologue, éd. RFI 1975 et éd. Haho 1984
[3]Saz l'Ami-de-Celui-qui vient-Directement-Après-Le-Directeur , nouvelle in Le Fossoyeur, éd. Hatier 1987
[4]Ernest Renan, Oeuvres complètes, Calmann-Lévy éd. 1949, p. 7001
Burundi : Malgré l’échec du putsch, le vent républicain souffle d...
Written by Bill Emile DavolkIl va sans dire que coup d’Etat et démocratie sont idéologiquement et philosophiquement antinomiques. La rédaction de votre émission FSA ne cautionnera ou ne fera jamais l’apologie des coups d’Etat militaires. Nous connaissons toutes et tous les affres et, surtout, l’obstruction à toute avancée humaine et sociétale des régimes militaires installés par le biais de coups d’Etat. Le cas togolais fait légion.
Une autre politique d’opposition est encore possible. La CDPA-BT est toujours disponible pour examiner, avec tous ceux qui refusent les mascarades électorales, les voies et moyens pouvant nous permettre de définir ensemble cette autre politique, et de conférer à l’opposition une organisation appropriée pour la conduire avec la probité et la rigueur intellectuelle nécessaires.
La mascarade est derrière nous
La mascarade électorale est à présent terminée. Les résultats proclamés ne devraient surprendre personne. Les chefs des partis du courant majoritaire de l’opposition ont accepté d’aller aux élections dans les conditions que l’on sait. Ils savaient bien que, dans ces conditions-là, les élections ne pouvaient pas donner autre chose que ce qui vient d’être proclamé par le régime. Ils ont certainement obtenu ce qu’ils comptaient tirer de leur participation au scrutin. Mais pas la masse des opposants.
La masse des opposants s’est faite flouer une fois de plus : l’alternance au pouvoir n’est pas réalisée ; Faure Gnassingbe est toujours là ; il entame un troisième mandat contre la volonté populaire ; rien ne permet de dire que les « réformes » ne tomberont pas toutes seules du ciel, comme le laissent croire certains ; l’opposition est plus que jamais affaiblie...
Comme nous n’avons cessé de le dire à la CDPA-BT, ceux qui ont ainsi accepté de participer aux élections dans ces conditions inacceptables ont, une fois de plus, rendu service au régime. Comme toujours, leur participation a permis à tous ceux qui ont intérêt à voir le régime perdurer, de proclamer en chœur que les élections sont libres, transparentes, pacifiques… et donc démocratiques. Ceux-là ont beau jeu de travestir ainsi la réalité, puisque des partis du courant majoritaire de l’opposition ont accepté de participer au scrutin pour des raisons sans aucun rapport avec les aspirations du peuple.
C’est pour éviter cette déformation facile de la réalité que la CDPA-BT avait appelé au boycott. Il faut, en effet, que l’opposition cesse de prendre part à des mascarades électorales organisées pour maintenir le régime en place, contre la volonté populaire.
Aucune marge de manœuvre
J-P Fabre est classé en première position par rapport aux trois autres candidats de la mouvance de l’opposition. C’est, de toute évidence, le but réel visé par la participation de l’ANC au scrutin. Dans la réalité, tout le bruit monté autour de CAP 2015 n’est qu’une question d’affichage.
C’est ce but inavoué qui explique le revirement brutal de ce parti par rapport au discours sur « le combat pour les réformes », et le curieux « nous allons gagner sans les réformes ». Tout le monde savait bien que dans les conditions où le scrutin allait se tenir, l’alternance était illusoire ; et à plus forte raison toute forme d’alternative politique.
On ne sort pas en réalité du principe absurde de la compétition entre partis d’opposition pour le pouvoir. Pour les dirigeants de l’ANC, le but véritable de la participation au scrutin dans ces conditions inacceptables pour l’opposition, n’est rien d’autre que la confirmation de Fabre dans ce rôle de « chef de file de l’opposition » institué par le régime en 2011 pour museler l’opposition et préparer l’entrée du pays dans « la démocratie apaisée ».
C’est en cela que le « nous allons gagner sans les réformes » est une contrevérité, une manière de flouer encore la masse des opposants. L’approche passionnelle du combat pour la démocratie n’a pas permis aux partisans inconditionnels de l’ANC d’aller au-delà des apparences trompeuses, pour saisir les réalités. Que va faire à présent J-P Fabre ? Le silence dans lequel il a entretenu l’opinion depuis la proclamation des résultats, jusqu’à la veille de ce meeting du 9 mai 2015, à dérouté nombre de ses partisans inconditionnels.
J-P Fabre donne l’impression de ne pas savoir quoi faire. « …ils ne faut pas laisser les gens se décourager… on ne va pas commencer des choses qui vont échouer… il ne faut pas faire des choses qui n’ont pas été bien réfléchies… » Venant du chef d’un grand parti qui vient de briguer la magistrature suprême, et qui était si convaincu que l’ANC et son CAP 2015 vont prendre le pouvoir « sans les réformes », la déclaration parait peut-être sage ; elle n’en est pas moins surprenante. Dans tous les cas, elle montre que l’ANC n’a pas beaucoup de marge de manœuvre. Beaucoup, c’est d’ailleurs trop dire.
Une seule possibilité : accompagner le régime d’une manière ou d’une autre
A la veille des élections, Fabre avait rassuré ses troupes, en leur proclamant que l’opposition gagnera les élections « sans les réformes », et qu’il suffit, pour cela, qu’elles aillent massivement aux urnes voter pour lui. Comme la grande masse des opposants, beaucoup de ses propres partisans n’ont pas cru au discours. J-P Fabre le sait. En conséquence, il ne peut pas se mettre maintenant à appeler la population à venir « défendre sa victoire ».
Et il le peut d’autant moins qu’il avait, lui aussi, signé avec une facilité déconcertante ce « consensus-piège », où il a accepté d’aller aux urnes sur la base d’un fichier électoral fabriqué pour permettre au régime de se maintenir au pouvoir, et où il s’est engagé de s’abstenir de toute manifestation susceptible de détruire l’image illusoire « d’élections pacifiques » dont on veut enrober le scrutin, et l’image non moins illusoire de « démocratie apaisée » que le régime tient à donner au troisième mandat de Faure. Fabre a les mains liées. Il peut dénoncer les résultats proclamés. Mais il ne peut aller au-delà. Il sait d’ailleurs que le gros de ses troupes n’est plus prêt à aller battre le pavé pour lui comme en 2010.
Fabre et ses amis n’ont plus désormais le choix qu’entre deux alternatives possibles : Cultiver à fond une posture « d’opposant historique » et de « chef de file de l’opposition » pour tenter d’amener Faure Gnassingbe à lui octroyer les prérogatives et les avantages prévus par l’inacceptable nouveau « statut de l’opposition » ; ou alors, adopter un profil suffisamment bas, pour mettre Faure en position de lui offrir une occasion de négocier un nouveau partage du pouvoir, cette fois-ci au profit de l’ANC : quelques postes ministériels assortis de privilèges liés à l’exercice du pouvoir d’État, comme ce fut le cas pour Gilchrist Olympio et ses AGO en 2010. J-P Fabre n’avait-il pas dit d’ailleurs le 2 juin 2009, quand il était encore Secrétaire général de l’UFC, que « le pouvoir, ça se négocie aussi … [et] qu’il ne faut pas jouer aux Ayatollah » ? Les temps ont changé depuis bien sûr ; et Fabre est devenu Président de l’ANC. Mais les mentalités et la vision qu’on a du pouvoir et de la lutte d’opposition pour le conquérir ont-ils changé pour autant ?
Le temps de la réflexion
Ce scrutin de 2015 est catastrophique. Mais il a au moins le mérite de remettre sur le tapis des interrogations auxquelles chaque Togolais aspirant au changement démocratique doit apporter cette fois ci des réponses claires.
Qu’est-ce qui avait poussé les togolais dans la rue en 1990 ? Le Togo est-il devenu un pays démocratique depuis ce temps-là ? Peut-il le devenir par le biais d’élections montées pour prolonger la vie du régime antidémocratique ? Est-il normal que dans la situation politique spécifique du Togo, des partis d’opposition acceptent de participer à des élections sur la base d’un fichier électoral "imparfait" ? Fallait-il aller à ces élections de 2015, sans des changements constitutionnels et institutionnels profonds, destinées à rendre les scrutins réguliers et démocratiques dans le pays ? Le discours suivant lequel « …nous allons battre Faure Gnassingbe sans les réformes » est-il juste ? Est-il vrai ? Pourquoi les partis d’opposition ne parviennent-ils pas à se mettre ensemble sur la base d’un programme politique minimum, cohérent, pour rendre l’opposition plus forte, plus crédible, et par conséquent plus efficace ? Après ces élections de 2015, qui peut encore continuer de soutenir le principe de la compétition entre partis d’opposition pour le pouvoir comme stratégie pour réaliser le changement ?
Dans ces conditions inacceptables d’organisation et de déroulement des élections, appeler au boycott est-il « ouvrir un boulevard devant Faure Gnassingbe » comme l’ont soutenu les candidats du courant majoritaire de l’opposition et leurs partisans ? En allant à ce scrutin présidentiel de 2015 dans ces conditions inacceptables, l’opposition a-t-elle gagné quelque chose pour faire avancer la lutte en cours pour la démocratie ? Est-il concevable d’appeler la masse des opposants à aller aux urnes voter contre les intérêts de l’opposition ? Le courant majoritaire va-t-il vraiment dans la bonne direction ?...
Pour une autre politique d’opposition
Les interrogations ci-dessus formulées, et bien d’autres encore s’imposent une fois de plus à l’opposition, mais avec encore plus de force après ce scrutin de 2015. Elles appellent des réponses claires et justes de la part de tous ceux qui refusent de continuer de patauger dans la logique de la participation aux mascarades électorales destinées à maintenir le régime en place. Elles traduisent le fait que la politique d’opposition conduite jusqu’à présent par le courant majoritaire, ne peut pas conduire à l’alternance politique. Et qu’elle ne peut, à plus forte raison, pas déboucher sur une alternative politique susceptible de faire progresser les conditions de vie de la grande masse.
La CDPA-BT a donc adopté une position sans ambigüités sur le scrutin. Elle a appelé au boycott, parce que les conditions d’organisation du scrutin et de participation de l’opposition ne vont pas dans le sens des intérêts de la grande masse des opposants. Elle réaffirme que participer aux élections dans ces conditions n’est qu’une manière d’accompagner le régime. Le rôle des partis d’opposition n’est pas d’accompagner le régime, en lui permettant ainsi de se maintenir indéfiniment au pouvoir.
La CDPA-BT a constaté avec satisfaction qu’une proportion relativement importante de la population désavoue cette fois-ci la participation à tout prix à des élections dont l’opposition n’a rien à tirer. Ce désaveu signifie qu’une proportion de plus en plus importante de la population veut désormais une autre politique d’opposition, et une meilleure organisation de l’opposition.
La CDPA-BT est toujours disponible pour examiner avec tous ceux qui le souhaitent, les voies et moyens pouvant nous permettre de définir cette autre politique, et de conférer à l’opposition cette meilleure organisation. Une autre politique d’opposition est toujours possible.
Lomé, le 13 mai 2015
Pour la CDPA-BT,
Le Premier Secrétaire
E.GU-KONU
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Togo: Pourquoi la communauté internationale valide-t-elle la réélec...
Written by Bill Emile DavolkEditoriale de FSA du 09 mai 2015 sur radio Kanal K en Suisse
La lutte togolaise pour la démocratie et le bien-être est longue et n’aboutit jamais. C’est un vrai feuilleton. À qui la faute si le Togo et les Togolais sont humiliés ? Avant de répondre à cette épineuse question, j’aimerais d’abord lire avec vous un passage du Discours de la servitude volontaire d’Etienne de La Boétie. Ce passage, je le lis assez souvent lorsque je donne mon cours d’éthique sur « la désobéissance civile ». En effet, dans ce célèbre Discours, Etienne de La Boétie, sarcastique, s’attaque non au tyran ou au roi, mais au peuple, et appelle à la liberté contre la tyrannie : « Pauvres gens misérables, peuples insensés, nations opiniâtres en votre mal et aveugles en votre bien ! Vous vous laissez enlever sous vos yeux le plus beau et le plus clair de votre revenu, vous laissez piller vos champs, voler et dépouiller vos maisons des vieux meubles de vos ancêtres ! Vous vivez de telle sorte que rien n’est plus à vous. Il semble que vous regarderiez désormais comme un grand bonheur qu’on vous laissât seulement la moitié de vos biens, de vos familles, de vos vies. Et tous ces dégâts, ces malheurs, cette ruine, ne vous viennent pas des ennemis, mais certes bien de l’ennemi, de celui-là même que vous avez fait ce qu’il est, de celui pour qui vous allez si courageusement à la guerre, et pour la grandeur duquel vous ne refusez pas de vous offrir vous-mêmes à la mort. Ce maître n’a pourtant que deux yeux, deux mains, un corps, et rien de plus que n’a le dernier des habitants du nombre infini de nos villes. Ce qu’il a de plus, ce sont les moyens que vous lui fournissez pour vous détruire. D’où tire-t-il tous ces yeux qui vous épient, si ce n’est de vous ? Comment a-t-il tant de mains pour vous frapper, s’il ne vous les emprunte ?
Les pieds dont il foule vos cités ne sont-ils pas aussi les vôtres ? A-t-il pouvoir sur vous, qui ne soit de vous-mêmes ? Comment oserait-il vous assaillir, s’il n’était d’intelligence avec vous ? Quel mal pourrait-il vous faire, si vous n’étiez les receleurs du larron qui vous pille, les complices du meurtrier qui vous tue et les traîtres de vous-mêmes ? Vous semez vos champs pour qu’il les dévaste, vous meublez et remplissez vos maisons pour fournir ses pilleries, vous élevez vos filles afin qu’il puisse assouvir sa luxure, vous nourrissez vos enfants pour qu’il en fasse des soldats dans le meilleur des cas, pour qu’il les mène à la guerre, à la boucherie, qu’il les rende ministres de ses convoitises et exécuteurs de ses vengeances. Vous vous usez à la peine afin qu’il puisse se mignarder dans ses délices et se vautrer dans ses sales plaisirs. Vous vous affaiblissez afin qu’il soit plus fort, et qu’il vous tienne plus rudement la bride plus courte. Et de tant d’indignités que les bêtes elles-mêmes ne supporteraient pas si elles les sentaient, vous pourriez vous délivrer si vous essayiez, même pas de vous délivrer, seulement de le vouloir. Soyez résolus à ne plus servir, et vous voilà libres. Je ne vous demande pas de le pousser, de l’ébranler, mais seulement de ne plus le soutenir, et vous le verrez, tel un grand colosse dont on a brisé la base, fondre sous son poids et se rompre. » (Etienne de La Boétie, Discours de la servitude volontaire, dans Œuvres politiques, Paris, Editions sociales, 1971)
Ce qu’Etienne de La Boétie dit dans son Discours expressif correspond à merveille à la situation togolaise. II n’y a aucune phase dans ce texte qui ne décrive exactement ce qui se passe au Togo.
Mais à qui donc la faute si Faure au départ un président illégitime, illégal et indigne devient en fin de compte légitime, légal et digne aux yeux du monde entier ? De qui les Gnassingbé, de père en fils, tenaient et tiennent le pouvoir ? De qui avaient-ils reçu et reçoivent-ils tant de mains qui s’appesantirent et continuent de s’appesantir toujours sur le peuple togolais ? De qui avaient-ils reçu et reçoivent-ils toutes ces bottes avec lesquelles ils nous piétinèrent et continuent de nous piétiner si impitoyablement ? Qui donc avaient donné et donnent ce grand et excessif empire aux Gnassingbé, avec lequel ils nous écrasèrent et nous écrasent encore sans pitié, humilièrent et humilient toujours le peuple togolais ? Qui étaient ceux qui avaient fait et font des Gnassingbé, de père en fils, des rois ?
On peut répondre à cette problématique en disant que le mal togolais a trois racines robustes, qui nourrissent le pouvoir des Gnassingbé. Nous avons d’abord l’armée, une véritable écharde dans le pied de la démocratie togolaise ; ensuite, la duplicité de la communauté internationale ; et enfin, la faiblesse notoire d’une opposition qui n’a jamais su parler d’une seule voix devant un ennemi commun. Hier comme aujourd’hui.
L’armée
En effet, les premières racines du mal togolais, c’est l’armée. Disons les choses sans rien cacher sous le boisseau. Tous les Togolais le savent, même si beaucoup n’osent pas le dire haut et fort, à l’exception de quelques intrépides. Une armée fortement tribalisée, où tous les leviers de commande sont aux mains de la plupart des officiers ressortissants du nord du pays. Ce furent eux qui avaient parachuté Faure président à la colère et au grand dam des Togolais. Le pouvoir de Faure vient incontestablement de l’armée.
La communauté internationale
Les deuxièmes racines du mal togolais, qui confèrent aux Gnassingbé le pouvoir avec lequel ils nous écrasent, viennent de la fourberie d’une communauté internationale et de certaines organisations comme l’UE, l’ONU, l’OUA, l’OIF, la CEDEAO, etc. Il faut noter que c’est surtout la France qui a un cadavre dans le placard au Togo qui joue à la trouble-fête détestable. Elle a toujours peur qu’on ne ressuscite l’histoire classée top-secret.
Les opposants
Les troisièmes racines du mal togolais viennent de la mesquinerie et la turpitude d’une opposition à la togolaise, jamais vue ailleurs, et qui prête souvent à rire.
On se souvient du parjure de Joseph Kokou Koffigoh, qui voulait se présenter aux élections présidentielles de 1998, malgré l’interdiction formelle des textes de la transition. Faute de n’avoir pas pu se présenter, il était allé rejoindre le camp de Gnassingbé Eyadéma, sabotant ainsi la victoire du peuple togolais, arrachée de hautes luttes.
On se souvient de l’affaire Apollinaire Yaovi Agboyibo (36 élus) et Edem Kodjo (7 élus) au lendemain des élections législatives de 1995. Le premier voulait tout avoir : le poste de président de l’assemblée et celui de Premier ministre. Le second, qui eut alors 7 députés devenait incontournable, et selon lui-même, « la charnière » sur laquelle on devait poser la porte, autrement elle ne pouvait pas tenir, puisque ni le CAR, ni le RPT n’avaient eu la majorité absolue. Le président de l’UDT n’avait les yeux que pour le poste de Premier ministre. Devant l’intransigeance de l’un et de l’autre, devant le manque d’entente, de sagesse, les deux leaders, alors très adulés, transformèrent le succès des Togolais en échec au grand bonheur du RPT et de son président. Ils cassèrent la baraque en donnant tout le pouvoir à Gnassingbé le père qui reprit du poil de la bête. C’est ainsi que commença le feuilleton togolais, je veux dire le malheur des Togolais, qui dure jusqu’à aujourd’hui. Le bonheur n’a d’existence au Togo que de nom.
Les élections présidentielles de 1998 et de 2003 avec respectivement les victoires de Gilchrist olympio et de Bob Akitani, qui n’avaient pas fait ce qu’il fallait faire pour arracher le pouvoir, à l’exception d’une guérilla déclarée du bout des lèvres, que les Togolais n’ont jamais vue, fortifièrent également le pouvoir de Gnassingbé Eyadéma. Les deux gagnants avaient donc apporté sur un plateau le pouvoir à Gnassingbé Eyadéma qui était tranquille et imperturbable.
En février 2005, Gnassingbé le père mourut et Gnassingbé le fils prit le pouvoir de façon rocambolesque. Je l’ai tantôt souligné. Au lieu de rester intransigeant et ferme sur leur principe devant le jeune président illégal et illégitime, nos opposants ont tous accepté de collaborer avec lui, en devenant qui, ses Premiers ministres, qui ses ministres, qui encore ses conseillers. Nos opposants ont ainsi balisé le chemin et donné à Faure toute la légitimité. Ayant reçu d’eux les gants, Faure devient fort et leur refuse tout. Les accords conclus ne sont jamais respectés. Quelle humiliation ! Même les animaux n’accepteraient pas une telle humiliation.
On se souvient, par ailleurs, de la félonie de Jean-Pierre Fabre à l’égard de son mentor d’hier, Gilchrist Olympio, dont le parti est aujourd’hui mis en lambeaux. Même les jeunes qui en sont l’énergie sont mis dehors. Personne ne peut accepter ce court-circuitage de Jean-Pierre Fabre. Mais personne ne peut non plus accepter la réaction de Gilchrist Olympio, qui rejoint, avec armes et bagages, et toute honte bue, le camp de ceux qu’il a passé sa vie à combattre. Quelles indignités ! Même les animaux n’accepteraient pas de telles indignités. Gilchrist Olympio renforce ainsi le pouvoir de Faure Gnassingbé en refusant, malgré son âge, de laver son linge sale en famille. Disons que la sagesse n’a pas prévalu. Il donne à Faure les mains avec lesquelles il frappe les Togolais.
On se souvient également du FRAC (Front Républicain pour l’Alternance et le Changement), du CST (Collectif Sauvons le TOGO), du CAP2015 (Combat pour l’Alternance Politique). Ces regroupements d’opposants togolais n’ont eu aucun résultat. Ce sont de simples blitz. Nous avons déjà entendu dire : « Faure must go ! ». Nous avons déjà entendu parler du dernier tour de Jericho. Faut-il aujourd’hui en rire ou en pleurer ! Tout cela n’a rien donné. Les egos ont pris le dessus comme d’habitude. Trop de chicanes et d’incompréhensions ont fait claquer la porte et la baraque est restée vide. C’est toujours les mêmes slogans, les mots éculés, les mêmes refrains dédorés, les mêmes accusations, les mêmes contre-accusations à la veille de chaque élection. L’opposition togolaise n’a jamais réussi à mettre la main sur le merle blanc. On a envie de dire que là où passe cette opposition à la togolaise, l’ordre et les bonnes manières pour l’intérêt du peuple trépassent. Et en se comportant ainsi, ils renforcent consciemment le pouvoir de Faure Gnassingbé. L’opposition togolaise non seulement tourne toujours en rond comme un ours en cage, fait la mouche du coche, mais aussi il n’hésite à aucun moment à se tirer une balle dans le pied à la veille des élections. Faure n’est puissant que par le pouvoir que lui donne l’opposition togolaise, qui se fait son esclave volontaire. Le pouvoir de Faure n’est fondé que sur la faiblesse d’une opposition bancale, ni chair ni poisson. Devant tout cela, on est irrésistiblement tenté de dire que Faure mourra au pouvoir comme son père. Si l’armée reste tribalisée, si sa structure reste telle quelle, et je doute que cela change un jour, si l’opposition reste à jamais divisée, il y a gros à parier que Faure mourra au pouvoir. Toutes les agitations sont peine perdue. Toute révolte du peuple qui ne serait pas accompagnée par l’armée n’aboutirait à rien. Et il est grand temps de dire aux opposants à la togolaise d’arrêter d’amener les Togolais à l’abattoir, de faire d’eux une chair à canon. Ils doivent arrêter de faire tomber les Togolais après chaque élection comme des mouches. On sait trop pour qui ils roulent.
Pourquoi donc là où ont réussi les Béninois, les Burkinabés, les Ghanéens, les Sénégalais, les Tunisiens, les Togolais échouent toujours ? Pourquoi le Togo devient-il la risée du monde entier. « Le Bénin n’est pas le Togo », a lâché Nicéphore Soglo. Cette boutade de l’ancien président béninois nous a touchés, mais il n’y a que la vérité qui blesse. On connaît maintenant la réponse. C’est à cause de la « tribalisation » de l’armée, de la turpitude et de la déliquescence de l’opposition. Regardez un peu les choses à la veille des élections au Togo. Ce sont toujours les mêmes comportements. C’est ridicule ! A cet égard, on peut donner raison à Agobéyomé Kodjo lorsqu’il dit que tous les actuels opposants togolais ont leur avenir derrière eux, et qu’ils doivent dégager le plancher pour laisser la place aux jeunes. Agbéyomé Kodjo et moi n’avons pas gardé les cochons ensemble, mais ce qu’il dit est très légitime et je ne peux que le relayer. L’opposition togolaise est aujourd’hui comme des sarments secs qu’il faut couper pour donner la chance à la vigne de refaire fût.
Thomas Tchakie Sékpona, Ph. D.