Comparaison n’est pas raison, dans la décennie d’avant le second millénaire, certains pays d’Afrique comptaient plus d’une quarantaine de Parti Politique, la plus grande démocratie au monde ou du moins perçue comme telle que sont les Etats-Unis n’en compte que deux, pouvons nous dire que ces pays africains sont plus démocratiques que les U.S.A. ? Non évidemment. Regardez avec quelle maestria Vladimir Putin manie les ficelles de la jeune démocratie ( ?) Russe qui se confond bien avec l’U.R.S.S. de ses pères.
En Italie, c’est toujours le tandem Berlusconi et les autres, un tour à tour toujours favorable à ce grand magnat et richissime homme politique. Au Pakistan, au Mexique, en Indonésie et autre, le multipartisme n’a fait baisser ni la corruption ni le népotisme et l’absence de justice reste un fléau majeur. Enumérer ici les pays qui se servent du multipartisme pour faire asseoir l’hégémonie d’une vue unique et d’un seul idéal serait peine perdue tellement cela semble être la norme.
Revenons à notre cher continent ou tout semble compromis et ou tous les feux semblent vaciller entre l’orange et le rouge encore qu’on ait l’électricité pour les faire fonctionner.
Au Sénégal, la réalité du multipartisme se vit depuis 1974 que son premier chef d’état le poète et chantre de la négritude Léopold Sédar Senghor paix à son âme a su conceptualiser dans une Afrique dominée à l’époque par le système stalinien de gestion du pouvoir. Mais à bien analyser le schéma sénégalais, nous pouvons dire et affirmer que ce n’était qu’un semblant de démocratie. Tout ce qui se faisait ailleurs dans les dictatures connues se faisait aussi au Sénégal. La confiscation du pouvoir, la caporalisation des médias, les assassinats politiques, le bâillonnement de la presse d’opposition, bref, vous connaissez la musique.
Nul ne doute qu’aux élections de 1988, le P.D.S de l’actuel président Abdoulaye Wade en était sorti vainqueur. Le P.S. de l’époque sous la férule d’Abdou Diouf les avaient tronquées et truquées, le premier opposant légal africain qu’était Wade était un habitué du system carcéral sénégalais. La prison, il en a connu, les brimades et l’exil aussi, souvent même la compromission pour sauver sa tête. Il fallait attendre Mars 2000 soit 26 ans après pour que le P.S. la mort dans l’âme et il faut le reconnaître l’envie d’Adbou Diouf de sauver le pays de l’incertitude qui le guettait, accepta honorer la volonté du peuple malgré les pressions des barons et des sbires de son régime.
Multipartisme n’est pas démocratie
A quelque exception près, tous les partis politiques africains ont une connotation soit ethnique, soit régionale ou religieuse où soit la combinaison de toutes ces trois variables à la fois.
Un exemple frappant et qui est d’actualité puisque le pays fut un symbole de stabilité et de développement, la Cote d’Ivoire.
La réalité politique ivoirienne est le résumé d’un assemblage de patchwork avec des ramifications chaotiques extraordinaires. La colonisation, l’immigration, la religion, la politique, l’économie, l’ethnie, l’éducation, bref, toute la recette qui consacre sa scissiparité actuelle.
Le plus vieux parti le P.D.C.I. des anciens présidents Houphouët et Bédié est perçu comme celui des Akans ; groupe ethnique qui s’étant du Centre à l’Est du pays. Le F.P.I. de Laurent Gbagbo celui des Krous dont le fief égrène une pari du Sud et englobe l’Ouest.
Le R.D.R. du premier Premier Ministre s’octroie les vastes terres du Nord. En Cote d’Ivoire, il y a le nord géographie et le nord sociologique (les nordistes occupant les grandes villes du Sud, de l’Ouest et du Centre) ou même votre patronyme a une implication déterminante sur votre supposé appartenance politique.
Au Congo (Brazzaville) les partisans de Bernard Kolela, Denis Sassou N’guesso et ceux de Pascal Lissouba se comptent dans leur ethnie ou leur Région respective. Au Congo voisin (R.D.C.) les critères sont les mêmes avec en plus d’autres extranéités
En Guinée, au Kenya, au Rwanda et ailleurs, c’est cette même logique d’appartenance selon des critères saugrenus. Quelque soit le programme de gouvernement que propose un parti, le plus attrayant c’est l’appartenance ethnique, religieuse ou régionale qui prime. Ce qui a fait dire en 1989 au Premier Ministre Français de l’époque Jacques Chirac que les Africains n’étaient pas mûrs pour le multipartisme.
Ce commentaire avait fait couler beaucoup d’encre et de salive, mais avait il tort ?
Oui, certainement, il avait tort, les prémices même de son analyse étaient erronées même
si les chefs d’états africains lui ont donnés raisons leur manque de cultures démocratiques.
Après bientôt deux décennies de multipartisme, la démocratie, la vraie n’est pas encore en vue dans nos pays. Comptez avec moi ce qui suit.
Au Gabon, Omar Odinba Bongo (72 ans) est au pouvoir depuis quarante et un (41) ans c'est-à-dire juste après la naissance de l’auteur de ses lignes.
Au Togo, Eyadema père après 38 ans de pouvoir sans partage c’est au tour du fils Faure de le succéder après avoir tordu le coup à la constitution du pays avec la complicité de certain chef d’état de la sous région et de la France, encore elle.
Au Zimbabwe (84ans), Mugabé demeure le maître absolu depuis l’indépendance en 1980 malgré l’état de déliquescence avancé du pays.
Lassana Conté (70 ans) déclaré plusieurs fois mort parce que sérieusement malade règne sur la Guinée depuis 23 ans.
L’inamovible Paul Biya (73 ans) du Cameroun est au pouvoir depuis 27 ans.
Blaise Campaoré au Burkina Faso se la coule douce depuis 1987.
Dos Santos en Angola, Yuweri Museveni en Ouganda, Méles Zénawi en Ethiopie, Omar el Béchir du Soudan ont en commun au moins deux décennies de pouvoir autoritaire.
Moussa Traoré, Didier Ratsiraka, Ibrahim Barré Mainassara, Maouya ould Taya, Siaka Stevens, Mohamed Siad Barré et Hissen Habré respectivement du Mali, de Madagascar, du Niger, de la Mauritanie, de la Sierra Leone, de la Somalie et du Tchad sont tous partis comme ils sont venus c’est dire par la violence après une moyenne de quinze ans au pouvoir. Même ceux qui avec l’avènement du multipartisme sont arrivés de manière acceptable et qui cherchaient à s’y maintenir par les mêmes tactiques et techniques révolues ont été gommés, Soglo au Bénin, Patassé en Centrafrique, Bédié en Cote d’Ivoire, le saltimbanque Couba Yala en Guinée Bissau et Pascal Lissouba du Congo Brazzaville dans une moindre mesure pour ce dernier.
Ce n’est pas le monopole de la seule Afrique au Sud du Sahara, Hosni Moubarak en Egypte y est et demeure depuis 1981 après l’assassinat de Sadate qui avait son propre record déjà établi, Kadhafi en Libye, le guide de la Jamahiriya jouit des libyens depuis 1969.
Zine Abdine Ben Ali en Tunisie a remplacé depuis 1987 une autre longévité Habib Bourguiba, en cinquante ans, la Tunisie n’a connue que ces deux présidents. Au Maroc ooooops là bas c’est un royaume on y touche pas
Depuis nos indépendances, ce sont toujours les mêmes que nous voyons.
Au moins trois générations sont grillées avant un probable changement. Voila qui explique souvent les crises récurrentes qui sévissent sur le continent et le fossé qui sépare l’approche des jeunes et leurs aînés à résoudre certaines situations politiques.
Aux Etats-Unis ou en Europe, les pères sont éliminés au profit des enfants, mais en Afrique les enfants sont sacrifiés au profit des pères, quel avenir donc pour nos pays ?
Difficile choix émotionnel entre qui commet le parricide et l’infanticide, seule la raison donnera un choix et vous avez devinez lequel.
Multipartisme n’est pas démocratie.
Aujourd’hui, la plupart des américains vous diront qu’il faut un troisième ou même plusieurs partis, mais les Démocrates et les Républicains conspirent pour que ce jour n’arrive pas au grand dam des citoyens.
Regardez le cas symptomatique du Mali ou il n’y a presque pas d’opposition sérieuse après que l’actuel président Toumani Touré ait distribué des prébendes aux supposés opposants qui s’en accommodent d’ailleurs très bien. Le pays fait l’expérience d’un nouveau système qui est de fait un parti unique. Devrions nous avoir fait tant de sacrifices, toute ces réformes pour aboutir à ces miettes ? Pensons nous à tous ces morts du 26 Mars 1991 ? Présentement, les rumeurs les plus persistantes font état du retour sur la scène politique du premier président élu démocratiquement au Mali, si ces informations s’avèrent, alors beaucoup de questions méritent d’être posées. Décidément ces gens ne savent pas partir en Homme d’Etat comme le Mwalimu Julius Nyéréré, le Madiba Nelson Mandela et le poète Senghor.
Alors vous me direz qu’est ce que c’est la Démocratie ?
Etymologiquement, c’est la gestion du pouvoir par le peuple, c’est un régime politique dans lequel le peuple exerce sa souveraineté lui-même sans l’intermédiaire d’un organe représentatif on parle alors de démocratie directe ou par représentant interposé alors c’est une démocratie représentative. Par dérivé, c’est la volonté du plus grand nombre ; aussi simple que ça vous me direz ? Oui, mais dans son application les hommes politiques perdent le nord. Et pourquoi ? Ha…, les intérêts personnels, les considérations inavouées, comme dirait l’autre : les hommes ont leurs raisons que la raison elle-même ignore.
Il est bon de se souvenir qu’en matière de démocratie il y a deux écoles de pensées qui se confrontent, se disputent et qui rarement se complètent.
Il y a ceux qui comme nous pensons que la démocratie est une valeur et qu’il n’est point nécessaire de fabriquer, de mentir ou d’abuser des citoyens pour arriver à ses fins, qui pensons que, lorsque les liberté de choisir et d’expression sont données au peuple, il est à même de faire le choix souverain et qu’ultimement le peuple ne saurait se tromper lorsqu’il a les faits à lui exposer.
Et il y a de l’autre coté ceux qui pensent que la démocratie est une technique pour aboutir à ses fins. Pour ces derniers, tromper, gruger, manipuler le peuple n’ont rien d’effroyable, la délation, les amalgames font partis du jeu démocratique. L’exploitation des sentiments de haine, la xénophobie, la confiscation des media sont leur fond de commerce.
Vous comprendrez laquelle des écoles a le plus grand nombre d’adepte chez nous.
La démocratie, la vraie, transpire de la liberté des institutions à fonctionner librement, elle transpire de la liberté des individus à s’exprimer librement, elle découle de la volonté réciproque de l’état et du citoyen à se protéger des abus de l’un contre l’autre, elle est cette balance de l’équilibre perpétuelle devant les justiciables, elle est ce garde fou qui canalise les débits excessifs des différentes composantes de la société. La démocratie est plus le fait d’accepter que d’imposer.
Ainsi dit, quel pays peut il s’octroyer le titre de la plus grande démocratie ?
Les Etats-Unis sont souvent vus dans ce prisme et pourtant il existe trop de failles dans la démocratie américaine. Les années Bush l’ont démontrées et tout près de nous les élections primaires Démocratique l’ont consacrées. La démocratie est un idéal que nous essayons de parfaire, c’est une notion très relative, nous devons nous garder de comparer des pays qui n’ont pas beaucoup en commun pour établir un classement.
L’Afrique notre continent a certes beaucoup à apprendre mais elle doit se garder de copier des models démocratique qui ne sont que trop souvent des caricatures. Nous avons l’obligation de la lui rappeler et de corriger les ratées. Nous ne le ferons que mobilisés, informés et libres. Ne nous trompons pas, le multipartisme n’est pas la démocratie.
Haidara Cherif FM Liberte
Chicago Illinois U.S.A.